vendredi 14 juin 2013

Jules Supervielle, Daniel Aranjo.


JULES SUPERVIELLE
Oloron-Sainte-Marie où repose Jules Supervielle.
Reste une pierre, à Oloron-Sainte-Croix,
reste une ombre
et ce cristal aigu et lavé des monts, par delà les forges d’Abel, pour des jours de grande éclaircie,
et l’Hôtel du Grand Mogol à sous-bois thermal,
et la chambre d’épicerie où ils moururent, que l’on apercevra de loin, instable printemps, arbustes en fleurs, à flanc de gave, depuis la rive adverse (branchages, bief en ruine, paix proche de confluent).

Un artiste silencieux, pensant à sa calme Seconde Symphonie, erre encore au pied des zelliges Belle Époque du Mogol ou sur les sentes et les rampes d’un Parc Pommé, souple endroit à lumières et lueurs d’aube, à crépuscule clair, avec pour monument son haut Lit Surréel à roues, comblé de terre, de plantes et gazon frais, tant cet univers compte aussi de tables prises de lévitation et de boulevards métaphysiques.

Et puis la Gare, à scierie fossile, à citernes de scierie fossile, à rail fossile et mangé d’acacias quand on regarde vers Canfranc et d’inaccessibles Espagnes, là-haut - la Gare, son quai abandonné à vieilles plinthes de granite dont on n’avait pas su voir toute la vieille époque gîtant là, au bout de notre pied…
Que verra-t-on des monstres érodés, du vieux bois médiéval de la basilique, avec sa bonne porte à pèlerinage ?
Quant à la tombe naturelle de Julio, elle était, ce neigeux printemps 96, peuplée de boutons d’or et de pissenlits, stars de cinéma.

Et puis des Vaches d’armorial, paissant sous le béret basque d’un vieillard proverbial, à l’ombre lente, et que l’on finit par trouver.
Ou ces dalles de Sainte-Croix même où le vieux nom de Supervielle, sous le pas du fidèle, s’érode au fil oublieux de quelques siècles à éclairage rasant (tel un film, dans une ombre pieuse et rustique de cathédrale).
Et la nécropole en pente où une haute Élégie rouilleuse pleure des pleurs de fer (statue de quoi ? et quelle Vierge immense ?),

tandis qu’une lumière tendre, à nos pieds, tasse dans la douceur le pays de Sainte-Marie, sur la plaine : et c’est déjà un proche quartier lointain, sous le jour d’une cape, et un autre monde sans fable.


Daniel ARANJO
11 juin 2013


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