jeudi 28 février 2013

Pour quoi sont les mortels ?


Pour quoi sont les mortels ? – Leur affaire est de connaître. Connaître ? Et qu’est-ce que connaître ? – C’est assurément n’être point ce que l’on est.
Paul Valéry L'Âme et la danse

mercredi 27 février 2013

Chacun son djihad !

Avec les primes qu'ils perçoivent sur chaque jeune Tunisien envoyé au casse-pipe en Syrie, les cheikhs de l'ignorance  financent les études de leurs  propres enfants à Harvard ou à Oxford. Chacun son djihad !

mardi 26 février 2013

L'âme et la danse


Paul Valéry fait dire à Phèdre à propos d'une danseuse : "... elle semble offrir des présents, des parfums, de l'encens, des baisers, et sa vie elle-même, à tous les points de la sphère, et aux pôles de l'univers...
Elle trace des roses, des entrelacs, des étoiles de mouvements, et de magiques enceintes...Elle bondit hors des cercles à peine fermés...Elle bondit et court après des fantômes! ... Elle cueille une fleur, qui n'est aussitôt qu'un sourire ! Oh ! comme elle proteste de son inexistence par une légèreté inépuisable !... Elle s'égare au milieu des sons, elle se reprend à un fil... C'est la flûte secourable qui l'a sauvée ! Oh mélodie!..."

dimanche 24 février 2013

Syrie : l'invasion des ignares


 La statue de Abul Ala Al Maari (973-1057) à Maarat Nooman décapitée  par les "révolutionnaires" de Jabhat Al Nosra.
 Le poète philosophe, le philosophe poète auteur de L'Epître du pardon, interdit dans certaines monarchies du Golfe, ne semble pas convenir au long hiver arabe qui s'annonce. Telle est l'invasion des ignares !

vendredi 22 février 2013

Solidaire avec Raja Ben Slama

J'apprends avec stupeur qu'un mandat d'amener a été émis contre notre amie Raja Ben Slama. A l'origine, une plainte déposée par le dénommé Habid Khedher, grand rapporteur de l'ANC.
Raja Ben Slama est professeur à La Manouba et elle est auteur de travaux remarquables sur les rites funéraires, sur la passion amoureuse et l'écriture, sur la psychanalyse et l'islam...

mardi 19 février 2013

intolérance et ignorance par Giulio-Enrico Pisani


Coran bleu, Kairouan, fin IXe. Musée du Bardo.
Voici l'extrait d'une réponse de Giulio-Enrico Pisani à un commentaire posté par  Digi le 9 février en  suite à mon post "L'étau se resserre autour des assassins", où il constate que libéralisme n'a rien à voir avec liberté et démontre d'autre part que religion et laïcité sont non seulement compatibles, mais aussi prescrites dans le Coran (paroles de l'Ange au Prophète) : « Pourquoi distinguer entre «les peuples» et les «religieux» ? Les peuples sont religieux, et surtout dans les pays musulmans les athées son une infime minorité. Mais les musulmans pensent aujourd'hui de plus en plus qu'on peut être croyant sans être rigoriste et sont de plus en plus jaloux de leur liberté individuelle. Ils sont de plus en plus laïcs, c'est-à-dire qu'ils tendent vers la liberté de pensée, d'expression et de culte. Cette soif de liberté n'a rien à voir avec le libéralisme économique qui, au contraire, coexiste parfaitement dans maints pays (notamment du Golfe) avec l'intégrisme religieux le plus sévère. Et de toute façon, les hautes hiérarchies de toutes les grandes religions se sont toujours fort bien  entendues avec les riches.
Le problème en Tunisie (mais ailleurs aussi) n'est pas entre laïcs (de gauche ou de droite, socialistes ou libéraux) et religieux, que sont la plus part d'entre eux, mais entre laïcs et islamistes. Ceux-ci ne sont en fait
pas plus religieux que la majorité des croyants et même de leurs ministres.
Mais ils ajoutent à la religion l'intolérance. Le problème est donc constitué par l'opposition entre les laïcs qui tolèrent les croyances et façon de vivre autrui et les islamistes qui veulent imposer aux autres leur façon de croire, penser, vivre et s'exprimer.
Je me permets en l'occurrence de vous signaler que ces intégristes d'inspiration wahhabite, salafiste ou autre, sont en rupture totale avec la parole de Dieu, dont ils n'ont sans doute jamais lu que ce qu'ils pouvaient arranger à leur sauce. Je cite : 
«sachez qu'à Notre Envoyé n'incombe que la communication explicite» (V,
92),


فَاعْلَمُواْ أَنَّمَا عَلَى رَسُولِنَا الْبَلاَغُ
الْمُبِينُ

«or Tu n'es là que pour donner l'alarme, et Dieu est répondant de toute
chose» (XI, 12),

إِنَّما أَنْتَ نَذِيرٌ وَاللَّهُ عَلى كُلِّ شَيْءٍ وَكِيلٌ
«à Toi la communication seule incombe, à Nous le compte...» (XIII, 40),

فإنما عليك البلاغ وعلينا الحساب

«s'ils se dérobent, seule T'incombe la communication explicite» (XVI, 82),

فَإِنْ تَوَلَّوْا فَإِنَّمَا عَلَيْكَ البلاغ الْمُبِينُ

«Nous ne T'avons envoyé que comme porteur de bonne nouvelle et donneur
d'alarme (XVII, 105)

وَمَا أَرْسَلْنَاك إلا  مُبَشِّرًا وَنَذِيرًا

«Lance donc le Rappel : tu n'es là que celui qui rappelle, tu n'es pas pour

eux celui qui régit» (LXXXVIII, 22-23).
فذكر إنما أنت مذكر لست عليهم بمسيطر

Cela démontre bien que l'Ange interdit au Prophète et à ses successeurs toute coercition en matière de religion, et que, de toute manière, ils n'ont pas à s'occuper d'affaires temporelles et que ces gens là n'ont rien à voir le véritable Islam. »

En relisant Salah Garmadi

"Quand le pays nous reviendra, nous serons à la hauteur du néant que vous nous fîtes et qui nous entoure"
Nos ancêtres les bédouins

dimanche 17 février 2013

Ce qui a réellement changé

Avant le 14 janvier, le monde était inhabitable. Depuis, la sphère de l'inhabitable a grandement rétréci. Elle se limite aujourd'hui à notre pays.

samedi 16 février 2013

Le pouvoir manifeste

Manifestation du pouvoir contre toute opposition au pouvoir et pour que le parti au pouvoir reste au pouvoir, avec plagiat des slogans de la révolution par le parti au pouvoir.








vendredi 15 février 2013

Hugo, Slim Ben Hmiden, Voltaire et des excuses britanniques


Quand on est ministre, on doit lire - comme sous le règne de Bourguiba - ou alors se taire -comme sous le règne de Ben Ali. Ne pas lire et ne pas se taire peut être désastreux. Jugez-en : 
Ulcéré à la perspective de devoir quitter le gouvernement, Mr Slim Ben Hmiden se débat comme un forcené et écume les plateaux de TV pour nous convaincre de je ne sais plus quoi. Sa dernière trouvaille : nous épater par sa culture. Loupé !
Pour saupoudrer son discours d'érudition, Mr Ben Hmidane cite Victor Hugo : "Je ne suis pas d'accord avec ce que vous pensez, mais je suis prêt à mourir pour que vous ayez le droit de vous exprimer". Mr Ben Hmiden est à mille lieues de penser que c'est du Voltaire. Et il tomberait des nues s'il apprenait que ce n'est même pas du Voltaire. Il n'en reviendrait pas s'il apprenait que c'est une femme qui a attribué cette citation à Voltaire.


 En 1939, Evelyn Beatrice Hall, excellente biographe de Voltaire, reconnaît le caractère apocryphe de cette citation et s'en excuse auprès de ses lecteurs (dont Mr Ben Hmiden ne fait visiblement pas partie) dans le tome LVIII de la revue Modern Language notes. Voici ce qu'elle note : « The phrase "I disapprove of what you say, but I will defend to the death your right to say it" which you have found in my book "Voltaire in His Letters" is my own expression and should not have been put in inverted commas. Please accept my apologies for having, quite unintentionally, misled you into thinking I was quoting a sentence used by Voltaire (or anyone else but myself)." 
S'il y a une personne à qui les excuses de Mme Hall ne s'adressaient pas, c'est bien notre impardonnable ministre.

jeudi 14 février 2013

Michel Schroeder, à propos Des passantes


Le zeitung vum Lëtzeburger Vollek publie cet article de Michel Schroeder sur le livre que Giulio-Enrico Pisani et moi-même venons de faire paraître aux éditions Op der Lay. Voici cet article : 
Une anthologie de poésie qui ne passera pas inaperçue

Des passantes et des passants, désirer, être désiré(e)

Être d’ici, c’est être également d’ailleurs et, être d’ailleurs n’est-ce pas aussi être d’ici. Les passantes et les passants sont de partout. Mais la poésie est-elle passante ou passagère ?
Difficile de répondre à la question, tant on sait que dans le grand ordre de l’univers, nous sommes si éphémères, nos écrits nous survivant quelque peu, mais en définitive si peu.
Que dire des relations amoureuses et affectives, prises elles aussi dans la valse du temps qui passe ?
L’anthologie Des passantes et des passants, désirer, être désiré(e), admirablement orchestrée par Jalel El Gharbi et Giulio-Enrico Pisani, publiée aux Editions Op der Lay (opderlay@ pt.lu, /www.opderlay.lu), tente, à sa manière, de répondre en filigrane à ces graves et pourtant belles questions.
Dans sa préface, mon ami Pierre Schumacher écrit : « En parcourant cet ouvrage, nous sentons bien que la vie, les amours, les nuages passent sans laisser de traces, mais que notre enchantement demeure ».
Mais les poètes sont-ils des passants comme les autres, où leurs amours demeurent-elles inscrites dans les étoiles jusque dans la nuit des temps, au-delà même des galaxies, échappant jusqu’aux fameux trous noirs ?
Enfant, vers 9 ans environ, lorsque j’ai commis mes premiers poèmes, afin de crier ce qui me broyait inexorablement, j’étais nourri d’une foi prodigieuse : que grâce à ma poésie on saurait enfin ce que je subissais et que grâce à ma poésie, mon nom resterait gravé à jamais dans une sorte de gigantesque bibliothèque intersidérale.
Raymond Schaack dans l’article qu’il a consacré à l’anthologie qui nous intéresse ici, conclut par : Le poème s’oublie, la poésie reste ! Au fil de cet ouvrage, nous pouvons lire des textes et des extraits de textes, entre autres, d’André Schmitz, Pierre de Ronsard, Eugène Fromentin, Marcel Proust, Paul Verlaine, Stéphane Mallarmé, Charles Bukowski, Charles Trenet, Victor Hugo, Emile Nelligan, Albert Dreux, Alain Madeleine-Perdrillat, Edmond Dune, Rainer Maria Rilke, Béatrice Libert, Emile Verhaeren, Odilon-Jean Périer, Barbara, Georges Moustaki, Nimâ Youshidj, Patricia Guenot, Nazim Hikmet, Romain Rolland, Paul-Jean Toulet, Gustave Flaubert, Sanford Fraser, Nada Leil, Georges Malkine, André Breton, Jacques Prévert, Wadih Saadeh, ainsi que plusieurs dizaines d’autres, dont la charge poétique est aussi forte, énigmatique, fantastique, inspirée que ceux dont j’ai cité les noms.
L’anthologie est articulée autour de 4 axes : « Tous passants » ; « Les passantes furtives » ; « Passants et Passantes surréalistes » ; « Celles et ceux dont on se passerait bien ».
Impossible de vous donner à lire des textes ou des extraits de textes de tous les auteurs qui figurent dans cet ouvrage, probablement pour cette raison ai-je la conviction, que mon choix, de vous proposer des poèmes ou extraits de textes en prose, d’auteurs de chez nous est la bonne : Edmond Dune, Giulio-Enrico Pisani, Pierre Schumacher, ainsi que du chef d’orchestre Jalel El Gharbi.
Edmond Dune
Né à Athus, dans la zone de trijonction des nations française, belge et luxembourgeoise, le baroudeur – légion étrangère, résistance, croix de fer – et écrivain prolixe, poète et auteur dramatique luxembourgeois Edmond Dune synthétise à lui seul tout à la fois l’unité et la meurtrissure d’une Grande Région déchirée par d’aberrantes frontières. Plutôt que sempiternelle pomme de discorde, pour lui agora culturel, où se croisent et s’entrelacent les grandes voies, les paisibles artères et les modestes passages de la civilisation. Peu indulgent pour l’individu, il a foi en l’Homme.
Pour Edmond Dune, la rue passante est un prétexte à une lecture des signes de la diversité, de la différence. Voir autant de particularités défilant sans interruption suscite enchantement et émerveillement. Les passants se déclinant à l’envi sous le regard du poète, en tout cas de l’instance ici désignée par le pronom « il » et sous le regard froid de la fatalité, de l’inéluctable présent sous un monde euphémique au dernier vers.
Le Centre de la ville *
Il regarde passer d’un œil aigu secret Les bonheurs les bijoux les nuques parfumées Les pâleurs les courroux les lèvres desséchées Les douceurs les genoux les paupières baissées Les rôdeurs pleins de poux les âmes harassées Les chercheurs d’amour fou les jambes flagellées Les voleurs les pioupious les têtes condamnées Les penseurs les marlous les prêtresses damnées. Ils passent bien comptés à pas pressés à pas comptés Leur visage porté à hauteur d’homme Mais lui le figé dans le cristal du jour Le simple et le caché, l’ouvert et le fermé Le regarde passer ce peuple d’os et d’ombres Bénévoles passants qui jouent graves leur jeu Avec la fatale sérénité des astres dans le ciel. (*) Tiré du recueil Oeuvres Poétiques, Editions Phi, Differdange, 2011 (www.phi.lu).
Giulio-Enrico Pisani
L’auteur dit, chante, exprime la passante par excellence, celle qui est destinée à le rester, à ne jamais cesser de passer, autorisant de la sorte toutes les fougues : Sœur inconnue * Toi la passante, dont le chemin, Jour après jour, toujours le même, Croise ma route, certes, en vain, Depuis trente ans, inconnue, je t’aime.
De ton sourire - c’est tout ce que j’ai - Les frôlements distants je chéris. Tu es comme une sœur, mais un jour, qui sait, Dans l’au-delà ou au paradis L’amour que nous n’avons pas fait Vêtu d’inceste nous sera permis. (*) Tiré du recueil Amours d’un soir de septembre / Spätseptemberabendliebe (Editions Schortgen, Esch-sur-Alzette, 1996)
Pierre Schumacher
Chez l’écrivain luxembourgeois Pierre Schumacher, la poésie sourd comme parfum volatil - quasi clandestin - de son contenant secoué entre les coffres de l’écrivain, du philosophe, de l’architecte, du peintre et de l’illustrateur, comme entassées dans un porte-bagages du transsibérien.
Comment ne pas penser ici à Blaise Cendrars en lisant ce voyageur au regard aussi attentif que perpétuellement émerveillé du monde ? Pierre Schumacher a publié en 2005, aux Editions Saint-Paul (www.editions.lu) Quand deux trains se croisent et en 2010 un journal, La Quatrième saison.
À la rue, le poète substitue le quai d’une gare où l’on ne fait que partir. La passante se décline ici en voyageuse, sans doute littéralement et dans tous les sens (pour reprendre l’injonction rimbaldienne). Le poème se termine sur la Détresse. Tout finit en détresse. À la réflexion, ce n’est pas la passante qui est furtive, mais la vie.
Blonde, beige et sans bagages* Le quai d’une gare ressemble à une allée. Le vent y chasse Les feuilles.
Les gens sont pressés avides de travail de se reconnaître dans cet ouragan humain.
Une femme surgit blonde, beige et sans bagages portée par la foule aspirée par les escaliers du quai 10 AB Des dessertes anonymes engloutissent la foule famélique.
Un TGV désolé s’enfonce immobile dans les triages. Une chose est certaine tu seras là. Un transsibérien s’enfonce en moi, Un martèlement dans la nuit, Un dérèglement des sens (coïtus interruptus en gare de Bettembourg).
Les gens courent Wagon-lit Échauffé.
Je n’ai, dit-elle, de toi que détresse. (*) Tiré du journal La quatrième saison (chez l’auteur : Tél : 45.28.26)
Jalel El Gharbi
Les vers d’El Gharbi nous découvrent une autre cruauté, celle du multimillénaire fatum méditerranéen. Tout chez El Gharbi est dans le raffinement et la complexité du métaphorique. Avec lui nous naviguons entre les houles martelées d’Aboul Ala Al-Maari, et les vastitudes tempétueuses des « Mille et une Nuits » dans le vent des questionnements récurrents sur sa raison d’être et sur ses rapports métaphysiques avec la nature, le monde, l’univers ou ce Dieu, qu’on appellera comme on voudra.
Tâ*
Je n’aurais retenu que Tariq La route. J’aurais passé mon temps À tracer un tariq qui va de Rome À Damas, Si près de la fontaine nawphara Qui vient de ninawphar Qui a donné nénuphar Il y avait la passante Si sombre en sa beauté Rachid al-Hallaaq Abû Shâdî, Le dernier conteur de Damas Ne pouvait pas savoir que la passante avait pris mon âme Comment trouver un tariq de la plaine de Kairouan Vers la cité lointaine En passant par les rives d’un fleuve Qui coule en moi J’aurais promené ma soif de Tariq Sur les routes de ce que je n’ai pu apprendre
(*) Tiré du recueil Prière du vieux maître soufi le lendemain de la fête. (Editions du Cygne 4, rue de Vulpian F- 75013 Paris Tél. : 00 33-1-55.43.83.92)
Revenons aux initiateurs et chefs d’orchestre de cette savoureuse anthologie. Jalel El Gharbi, universitaire tunisien, surfe sur les cultures les plus diverses dans un grand mouvement fraternel. Je me souviens des articles que j’avais consacré à deux de ses publications, José Ensch, glossaire d’une œuvre, publié par l’Institut Grand-Ducal, Nous sommes tous des Migrants, Editions Schortgen. Giulio-Enrico Pisani, dont vous pouvez lire de façon régulière les présentations d’expositions dans les colonnes de votre « Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek », est un auteur et poète haut en couleurs, marqué par son parcours européen intéressant. Il a vu la lumière du jour à Rome, en 1943. En 1951, il part pour la Suisse avec ses parents, puis ses terres d’accueil seront la Belgique, l’Allemagne et le Luxembourg. On se souviendra de sa contribution exemplaire à l’ouvrage Nous sommes tous des migrants (Voir mon article publié en date du vendredi 10 juillet 2009 en page 2 du « Zeitung » sous le titre Giulio-Enrico Pisani et ses ami(e)s mènent une guerre impitoyable contre la fasciste Forteresse Europe : ne sommes-nous pas tous des migrants ?), ainsi que de son livre Charles Marx, un héros luxembourgeois, publié aux Editions du Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek.
L’anthologie Des passantes et des passants, désirer, être désiré(e), est illustrée par Carole Melmoux. Les peintures de cette artiste sont inspirées par le réel, le souvenir et l’imaginaire. Ses œuvres sont, pour la plupart, de véritables échanges avec des poètes, des clins d’œil à des poètes.
J’ai bien envie de conclure cette chronique, par des vers de Pisani : Toute mon existence sera faite d’occasions manquées douloureuses... sans regret, car, ma foi, rien n’est plus joli qu’un papillon envolé.
Michel Schroeder
jeudi 14 février 2013

Rien ne nous empêchera d'aimer


Parce que rien, absolument rien, ne nous empêchera d'écrire de la poésie, d'aimer, d'écrire des poèmes d'amour, de faire la fête, de fêter la Saint-Valentin, parce qu'aucune peine ni aucune fête ne nous sont étrangères. Parce que rien ne nous empêchera de nous enivrer, voici quelques vers :  
À tes yeux je suis comme un nouveau-né
Je n’ai nulle blessure nulle peine
Je sais rire, désirer, faire rire.

Je peux tout oublier, ne rien garder
Hormis le matin des lèvres offertes
Mon radeau et mon ivresse, ma source
Et ma grande peur des dernières grêles
Mon grand matin de jade et de violettes.
Le Bernin : Apollon et Daphné

mercredi 13 février 2013

Sinistres ministres !

Je n'aurais pas mis en ligne ce texte, billet d'humeur écrit dans le feu de l'actualité comme un défoulement, si je n'avais pas lu la dernière : Mr Marzouki est préoccupé par les essais nucléaires de la Corée du Nord. Voilà pour lui et pour les ministres de son parti :
Face à la crise, le Président brandit la menace de la démission, puis, ne voyant personne le prier de revenir sur sa décision, il prend les devants et nous rassure : il ne démissionnera pas. Ouf ! Il respire d'aise.

 Ce qu'il ne sait pas, c'est que nous savions qu'il ne laisserait pas sa sinécure à Carthage, lui qui croit que nous le croyons utile parce qu'il a ouvert la cage à un canari à Bizerte (à ne pas en douter le canari est mort de faim depuis), qu'il a planté un olivier en Ethiopie, qu'il a jeté un bouquet de fleurs au large de Lampedusa qu'il a aussi reçu au palais présidentiel des têtes de terroristes et qu'il a organisé quelques conférences au palais dont deux ou trois données par d'éminents ulémas salafistes.
Les ministres de son parti, le CPR, finassent eux aussi et nous jouent la même farce ridicule. CQFD : le CPR et le mouvement Wafa, ridicules appendices de Nahdha, devraient arrêter de souffler ce qu'ils croient être le chaud et le froid. Tout cela nous laissera de glace ! 
Dans ce gouvernement, on ne démissionne pas. On le savait bien avant l'assassinat de Chokri Belaïd. Sinon, le ministre de l'Intérieur aurait démissionné  suite au sac de l'ambassade des USA par les salafistes, l'arrogant ministre de l’Émigration suite à la mort de centaines de Tunisiens au large de nos côtes, le ministre de l'éducation suite aux fuites au baccalauréat, la ministre de la Femme suite au scandale des 1000 litres d'essence qu'elle s’octroie, le ministre de l'enseignement supérieur suite à la promotion dont il s'est gratifié, le ministre des Affaires étrangères pour ignorance désespérément irréparable, le ministre de l'agriculture suite aux pénuries de lait et autres produits de première nécessité, le ministre de la justice pour les violations quotidiennes de la loi, le ministre des finances pour les dévaluations tout aussi quotidiennes du dinar, le ministre des Affaires religieuses pour misogynie, le ministre de l'investissement et de la coopération internationale parce que nous avons perdu nos marchés traditionnels, le ministre de l'environnement suite aux différents scandales écologiques, le ministre des sports pour niveau largement en dessous de la moyenne nationale, le ministre de la santé pour l'effondrement de notre système hospitalier, le ministre de l'emploi parce que le chômage est en hausse... 
Démissionner ne leur viendrait même pas à l'idée. Ils verraient le pays s'effondrer qu'ils n'y songeraient pas. Regardez plutôt les têtes d'enterrement qu'ils font à la perspective d'un remaniement ministériel. Pauvres hères, vous nous donnez la nausée ! Ils en oublient toute dignité. Regardez ces mines patibulaires!
Il faut vraiment qu'ils manquent de savoir-vivre pour se cramponner aussi lamentablement à un pouvoir vacillant : n'ont-ils pas de livres à lire, de symphonies à écouter, de musées à visiter ? Ils pourraient faire du vélo, aller à la pêche, ne rien faire, ce qui serait encore plus utile au pays.

Avec traduction en français (Marcel Khalife - Ya Watani مارسيل خليفه - إني اخترتك يا وطني


Après l'assassinat de son père, la fille du martyr Chokri Belaïd récita le texte de cet hymne. Quelques jours après, le Premier ministre rédigea un tweet énigmatique, le titre même de cet hymne. Voici une traduction rapide de ce texte (avec "sempervirent" en clin d'oeil pour notre ami Giulio-Enrico Pisani) :
J'ai opté pour toi, ô ma patrie
De bonne grâce et par amour
J'ai opté pour toi, ô ma patrie
Ouvertement et en secret
J'ai opté pour toi, ô ma patrie
Comme tu garderas un souvenir de moi
Mon époque peut bien me renier
Ô ma patrie, splendide patrie
Mon coeur, tu es sempervirent
Même si mes yeux trahissent ma peine
Mon coeur, tu es en révolution permanente
Même si mes matins sont assombris
Je suis venu en ces temps de reflux
En ces temps de fatigue extrême
Comme un fusil pour la violence et le courroux.

إني اخترُتك يا وطني
حُبّا وطواعية
إني اخترتك يا وطني
سِراً وعلانية
إني اخترتك يا وطني
فليتنكّر لي زمني
ما دُمْتَ ستذكُرني
يا وطني الرائع يا وطني
دائمُ الخضرة يا قلبي
وإن بان بعَيْنَيَّ الأسى
دائمُ الثورةِ يا قلبي
وإن صارت صباحاتي مَسا
جئتُ في زمن الجزْرِ
جئْتُ في عِزِّ التعَبِ
رشاش عُنفٍ وغضب

lundi 11 février 2013

Que se passe-t-il en Tunisie ?

Maître Basma Khalfaoui (veuve du leader Chokri Belaïd)

Une date charnière : le 6 février, jour de l’exécution de Chokri Belaïd. Il se savait traqué ; on le savait menacé, mais personne ne pensait que ses ennemis iraient plus loin que Ben Ali, qui se contentait d’intimider et tout au plus d’infliger une bastonnade aux opposants les plus récalcitrants. Or il est impossible que les Tunisiens acceptent que l’on aille plus loin que Ben Ali. Aujourd’hui, démasquer les commanditaires ne répond pas à un besoin de vengeance. C’est la condition sine qua non pour que le meurtre de Belaïd demeure un acte isolé et qu’il n’y ait pas de récidive. La peur est réelle dans les milieux des démocrates. Des présomptions pèsent sur des islamistes ayant infiltré le ministère de l’Intérieur. Du côté des islamistes, on s’en défend et on incrimine tout le monde. Il s'agit d'accusations farfelues qui frisent le ridicule et ne méritent pas d’être mentionnées (Nida Tounès, les caciques du RCD, la France, Israël, la gauche, les USA…)
Même si l’on imputait cet assassinat aux Martiens, la responsabilité politique de Nahdha n’en est pas moins établie : c’est elle qui, au nom de la liberté, a  encouragé les salafistes et en a fait des alliés jouissant d’une impunité totale. C’est elle qui a incité à l’islamisation (entendez la wahabisation) de la société et qui a diabolisé les opposants, tantôt « des caciques du régime de Ben Ali », tantôt des « orphelins de la France » (sic). Des prédicateurs sont venus nous apprendre la nécessité de l’excision, du mariage précoce, de la polygamie et autres hérésies prônées par les « savants ». Les monarchies du Golfe semblent ne pas vouloir d’une démocratie en Tunisie qui pourrait contaminer leurs pays.
C’est dans ce contexte qu’intervient l’assassinat de Belaïd. En l’occurrence, il convient de ne pas tenir compte du principe « à qui profite le crime ? ». Celui qui en tire profit, ce n’est pas le commanditaire mais la victime. Aujourd’hui, les Tunisiens découvrent le visage de cette gauche qu’ils n’ont jamais bien connue. Aujourd’hui, les démocrates sont unis, plus forts.  
Seule l’instruction pourra dire qui a commandité ce crime : un complot tramé depuis l’étranger ? L’aile salafiste de Nahdha ? Ou des Martiens ?
Les balles qui ont tué Belaïd sont désormais une bombe au sein du parti Nahdha qui ne peut plus ignorer les contradictions qui la traversent. Ces contradictions auraient dû éclater dès l’accession de ce parti au pouvoir et surtout depuis la création de la troïka. Il n’y a aucune raison pour que ce parti échappe au sort connu par ses alliés : Ettakatol qui s’est effrité et le CPR devenu un appendice ridicule de Nahdha. Mr Ghanouchi ne peut plus continuer à étouffer ces contradictions ni continuer à afficher un visage de démocrate tout en appuyant en catimini les salafistes. Il y va de la pérennité de l’Etat tunisien. Or cet Etat prouve encore une fois sa force et surtout son aptitude à faire les hommes d’Etat. Car ce sont les Etats qui font les hommes et non l’inverse. Le nouvel homme d’Etat se nomme Hamadi Jebali. Il a le soutien de l’opposition et vraisemblablement des institutions qui comptent dans le pays : l’UGTT, l’armée. Cette dernière est aussi muette qu’éloquente. Il n’ y a absolument rien  qui indique qu’elle a pris fait et cause pour le Premier ministre et pourtant cela semble certain. Il est impensable qu’elle n’ait pas une dent contre les extrémistes religieux. Elle a dû les affronter à plusieurs reprises. Par ailleurs, cette armée républicaine n’accepte pas la présence de milices ni d’aucun autre corps armé dans le pays. Mieux encore, elle ne peut pas tolérer qu’on brandisse un autre drapeau en Tunisie, fût-ce celui d’un présumé califat.
Aujourd’hui, la question est de savoir si l’aile dure de Nahda, celle de Mr Ghanouchi, l’emportera. Nahdha doit comprendre que les purges auxquelles elle a appelé doivent avoir lieu dans ses propres rangs avant tout. Elle doit accepter que ses « faucons » aillent rejoindre les salafistes, c’est-à-dire qu’ils quittent les sphères du pouvoir.  Car il n’y a plus de place pour des ministres comme Mr Khadimi ou Ben Salem, pitoyables incarnations de l’incompétence. Il n’y a plus de place non plus pour les ambitieux du CPR, jadis parti militant devenu aujourd’hui un club d’ambitieux le plus souvent arrogants et autosuffisants. On n’en voudrait pour exemple que ce ministre, ancien réfugié au Soudan !!!, déclarant que la décision de mettre en place un gouvernement de technocrates mettait en péril les acquis de la révolution (on pourrait en parler des acquis de la révolution !). Finissons tout de même par évoquer l’attitude emblématique de Mr Marzouki avec ce populisme qui lui fait refuser de mettre une cravate (il en mettait pourtant), mais ne l’empêche pas de toucher 30 000 dinars dans un contexte de crise et de paupérisation générale. Nous ne devrions peut-être pas nous attarder sur le CPR, qui du reste n’a plus aucune popularité ni aucun avenir. L’histoire l’a déjà laissé en rade. Elle laissera en rade tous ceux qui veulent nous imposer le modèle wahabite, le crime comme mode de gouvernance. Tous ceux qui ne nous connaissent pas.

samedi 9 février 2013

L'étau se resserre autour des assassins

L'étau se resserre autour des assassins ...
Ici, Nayrouz, fille du leader Chokri Belaïd en tee-shirt portant l'inscription : qui a tué mon père ?

vendredi 8 février 2013

Enterrement et naissance وفـــاة و مــيلاد

Tunis. Mort d'un homme et naissance d'un symbole  : Chokri Belaïd.
تــونس : وفـــاة رجـــل و مــيلاد رمــز

mercredi 6 février 2013

Exécution de maître Chokri Belaïd

Ceux parmi les Tunisiens qui ne reconnaissent d'autre drapeau que celui-ci sont en deuil après l'exécution de maître Chokri Belaïd.

samedi 2 février 2013

Alcibiade, le plus diabolique et le plus angélique

Heidegger aimait à citer ces vers de Hölderlin extraits de son poème "Socrate et Alcibiade". Voici ce que le poète fait dire à Socrate à propos d'Alcibiade, le plus diabolique et le plus angélique des hommes :
" Qui a pensé le plus profond aime le plus vivant
   Et comprend la haute jeunesse
   Qui a percé le monde à jour
   La fin des Sages penche
   Souvent au dessus du beau."

Le chef du cabinet de la présidence accueille le cheikh wahabite au salon VIP de Carthage !


Les wahabites continuent à déverser leur inculture sur nous : après les prêches sur  l'excision, sur le djihad contre l'Occident mécréant, sur la polygamie, voici le prêche sur le voile pour les petites filles, cette fois-ci "sous le haut patronage de la Présidence".
Le chef du cabinet de la présidence accueille le cheikh wahabite au salon VIP de Carthage !