lundi 29 octobre 2012

Parution de La Fable du lac

Parution aux éditions Aden de ma traduction de la Fable du lac, roman de la qatarie Dalal Khalifa.
صدرت بباريس  ترجمتي لرواية القطرية  دلال خليفة "أسطورة البحيرة"

dimanche 28 octobre 2012

Soeur inconnue.

Soeur inconnue

Toi la passante, dont le chemin,
jour après jour, toujours le même;
croise ma route, certes, en vain,
depuis trente ans, inconnue, je t'aime.

De ton sourire - c'est tout ce que j'ai -
les frôlements distants je chéris.
Tu es comme une soeur, mais un jour, qui sait,
dans l'au-delà ou au Paradis
l'amour que nous n'avons pas fait
vêtu d'inceste nous sera permis.
Giulio-Enrico Pisani : Amours d'un soir fin septembre/ Spätseptemberabendliebe. Editions Schortgen. Luxembourg

vendredi 26 octobre 2012

La Passante


Portrait de José Ensch, publié en illustration de mon livre José Ensch : Glossaire d'une oeuvre... de l'amande au vin...
http://www.mediart.lu/index.php?id=214
La Passante

i.m José Ensch

J’aurais tant aimé planter un myosotis
Rue Marie Adélaïde
Le mettre si près du champagne matinal
À droite de la peinture
Juste en face des livres
Et tutti quanti.

J’aurais tant aimé marcher
Marcher
Jusqu’au parc où il y avait des canards
Du silence
L’ombre épaisse
Un carnet de poésie
Du vin et tutti quanti.

J’aurais tant aimé
M’asseoir à cette table
Où il y avait une plume
De jolis timbres
Une boîte de biscuits
Un crayon de soleil, un verre
Et tutti quanti

J’aurais tant aimé ouvrir la fenêtre
Voir passer la passante
Qui croit traverser la rue
Quand elle piétine mon cœur
Et qui ne sait pas que son visage
N’est qu’une image du temps
Et tutti quanti

Deux larmes ont suffi
Pour que j’écrive ce poème où je veux dire :
J’aurais tant aimé
Cueillir un myosotis
Si près des mots que tu aimais
« Tutti quanti » par exemple
Et tutti quanti





mardi 23 octobre 2012

hyperréalisme, abstraction, ou étincelle... Giulio-Enrico Pisani


Giulio-Enrico Pisani
  Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek Luxembourg, 20.10.2012

Gerd Marx : hyperréalisme, abstraction, ou
étincelle qui jaillit, là où les extrêmes se touchent ?

L’année 1952, qui vit la naissance de l’architecte d’intérieur et artiste photographe Gerd Marx, fut un millésime significatif pour les deux disciplines qui marqueront son existence: la photographie et l’architecture d’intérieur.  Ce fut en effet cette année là, que Charles-Édouard Jeanneret-Gris, dit Le Corbusier, acheva la Cité radieuse de Marseille, réalisa à Chandigarh (Inde) la Haute Cour et le Musée, puis, à Roquebrune-Cap-Martin (PACA), son fameux «Cabanon», une recherche sur l’habitat minimum, véritable sommet de l’architecture d’intérieur de l’époque.  Gerd Marx soupçonna-t-il l’existence de ce prestigieux parrainage?  Je n’en sais rien, mais le fait est que, après l’école et le bac, il se lança dans l’étude de la conception et du design en architecture d’intérieur.  Et cette discipline riche de nombreux arts ne fut pas la seule révélation du charme qu’une fée, ou muse, déposa dans son berceau en 1952, mais aussi celle de tous ces autres arts qui la constituent.  Je pense, entre autres, à l’architecture, à la décoration, à la peinture et, last but not least, à la photographie, passion qui prit possession de lui dès l’âge de huit ans.

Aussi libre que peut l’être un enfant par l’épanouissement de sa curiosité et un adolescent dans sa soif d’exploration, il découvrit grâce à la photographie, avec ses appareils box 6x6, puis Rolleiflex 6x6, Minolta reflex et autres Canon, tout un monde imagé, dont il parvenait à s’approprier des aspects insoupçonnés.  Il fut certes obligé, une fois adulte, donc face aux exigences de la vie, de limiter grandement sa créativité aux exigences de sa profession d’architecte d’intérieur.  Mais le genre de photo qu’exigeait celle-ci, pratiquée avec une Mamiya 645 format 4,5x6 à objectifs interchangeables (shift pour la photo d’architecture), ne chassa chez lui jamais tout à fait la photo violon d’Ingres, la photographie tous azimuts, la photo passion.  Pleinement retrouver sa magie à la fin de sa carrière professionnelle, ne donna par conséquent aucun mal au désormais jeune retraité Gerd Marx (je doute d’ailleurs qu’il ne l’eût jamais perdue) un demi siècle plus tard.  La faire triompher aux cimaises de la Galerie Michel Miltgen,[1] à l’occasion de sa première exposition photographique «libre» se fit du même élan.

Oui, libre!  Défi réussi; n’eût-on pas, en effet, pu s’attendre à ce que Gerd Marx profite et nous fasse profiter de sa longue expérience de la photo architecturale, des jeux d’angles et de lignes droites ou courbes, de perspectives, espaces, vides et volumes qu’il contribue à créer et à aménager et dont il maîtrise les harmonies depuis quatre décades?  Mais non, loin de se flatter de l’acquis, le libre artiste, qu’il est certain d’être, sait devoir se mettre en danger et, afin de retrouver les élans de sa prime jeunesse, devoir accepter les questionnements, risques et incertitudes de l’art.  Aussi, est-ce en artiste débutant, pour ainsi dire en jeune créateur, que ce sexagénaire nous convie à sa première exposition, où il s’expose du même coup à une critique dont il sait bien que l’approbation, voire l’indulgence, qu’elle soit des experts, des critiques d’art, des amateurs éclairés, ou de simples curieux, n’est jamais acquise.

Il m’est évidemment impossible de présumer de l’accueil que feront les médias, les visiteurs et d’éventuels acheteurs à ses splendides macrophotographies grand format de structures aussi fascinantes qu’ignorées par l’oeil ordinaire de ces êtres pressés et observateurs superficiels que nous sommes presque tous.  Combien parmi nous s’arrêtent-ils en effet pour admirer un clou rouillé, un morceau de bois pourri, une chaîne qui n’enchaîne plus que sa propre usure?  Et qui songerait à admirer une structure mal couverte de peinture écaillée pour découvrir dans la quasi-abstraction de cet étrange maculage – je pense à «Close-up 1» – une mer démontée, où un vortex, tornade ou terrible maelström risque d’engloutir un archipel en perdition?  Quant au clou de l’exposition, amis lecteurs, eh bien, c’est à première vue un vrai clou, en allemand «Nagel», aussi titre de l’oeuvre, quoique, la dépouille de cheville qui en coiffe la pointe comme une sorte de préservatif dont on aurait abusé, me fasse plutôt songer à une vis.  Mais, quelle importance!?  La beauté cruelle, pour ainsi dire minérale, de cette composition sculptée, ravinée et décapée par le vent, le soleil, le chaud, le froid et les embruns salins, en un mot, par les forces la nature qui, avec le temps, finissent toujours par vaincre l’oeuvre des hommes, cette beauté donc, saisie par Gerd Marx, est extraordinaire.

Hyperréalisme?  Sans doute, le terme est amplement justifié.  Il arrive cependant que les extrêmes se frôlent, se touchent même.  Aussi, les créations de Gerd Marx s’éloignent à tel point d’une vision, disons, normale, qu’en n’y regardant pas de trop près, donc au premier coup d’oeil, certaines de ses photographies donnent l’impression d’être abstraites.  Il en résulte des tableaux d’une beauté à couper le souffle et qui mériteraient d’être exposés dans tout musée d’art contemporain qui se respecte.  À ne pas rater!     



[1]  Galerie d’Art Michel Miltgen, 32 rue Beaumont, Luxembourg centre, ouvert mardi à vendredi 10-12,30 h & 14-18 h / samedi 9,30-12,30 h & 14-18 h.- Expo jusqu’au 8 novembre

dimanche 21 octobre 2012

William Cliff

Photo Jalel El Gharbi


l’auteur de la Recherche en ces années m’a révélé
que notre intime vérité c’est la littérature
Du côté de chez…. c’est-à-dire où le voile est levé
sur ce qui toujours est couvert de commune imposture

et qu’on ne vienne pas me parler de « science humaine »
et dégrader à des concepts le chant ou la douleur
qui fut le lot de notre enfance et dont la trace hautaine
continuera à nous tenir jusqu’à la dernière heure…

près du collège se trouvait un château à tourelles
hissé sur un piton rocheux qui dominait la Meuse
quand j’allais là me promener et remuer mes rêves

j’étais comme un second René dont l’âme ténébreuse
se perdait à travers pareil château ou vers des landes
mouvantes pour y prendre le poison de ses tourmentes
William Cliff

samedi 20 octobre 2012

تطهير assainissement ou purge


تطهير Ce mot n'est pas à traduire par "assainissement", mais plutôt par "épuration", "purge". Le concept est par définition antirévolutionnaire. Historiquement, il apparaît au moment où le fascisme emprunte à la révolution ses mots et sa rhétorique. C'est ainsi que ce ramassis d'obscurantistes, d'opportunistes et de spadassins se font appeler "ligue" comme La ligue tunisienne des droits de l'homme ! En Tunisie, ces ligues de protection de la révolution, formées de personnes qui n'ont pas pris part à la révolution, sont une menace pour notre pays. Ces ligues ont commencé cette lâche besogne d'épuration à Tatouine où un homme a été lynché, pour reprendre le mot employé par le président de la République même. Exigeons la dissolution de ce qui ressemble bien à une milice. Seuls les réalisations peuvent protéger une révolution. Et s'il faut absolument une structure pour protéger la révolution, que ce soit l'armée, force républicaine, qui a bien assumé ce rôle avant le 14 janvier. 



mercredi 17 octobre 2012

Chez Maurice Carême

Bureau de Maurice Carême à Anderlecht.
Ci-dessous la cuisine que fleurissent des physalis et un poème de Maurice Carême.  



La cuisine 



La cuisine est si calme
En ce matin d’avril
Qu’un reste de grésil
Rend plus dominical.

Le printemps, accoudé
Aux vitres, rit de voir
Son reflet dans l’armoire
Soigneusement cirée.

Les chaises se sont tues.
La table se rendort
Sous le poids des laitues
Encor lourdes d’aurore

Et à peine entend-on,
Horloge familière,
L’humble cœur de ma mère
Qui bat dans la maison.

(Maurice Carême, Mère, 1935)

vendredi 5 octobre 2012

Eugène Fromentin : Les Maîtres d'autrefois


Bruxelles, 6 juillet 1875.

Je viens voir Rubens et Rembrandt chez eux, et pareillement l’école hollandaise dans son cadre, toujours le même, de vie agricole, maritime, de dunes, de pâturages, de grands nuages, de minces horizons. Il y a là deux arts distincts, très complets, très indépendants l’un de l’autre, très brillants, qui demanderaient à être étudiés à la fois par un historien, par un penseur et par un peintre. De ces trois hommes, qu’il faudrait pour bien faire réunir en un seul, je n’ai rien de commun avec les deux premiers ; quant au peintre, on cesse d’en être un, pour peu qu’on ait le sentiment des distances, en approchant le plus ignoré parmi les maîtres de ces pays privilégiés.
Je vais traverser des musées, et je n’en ferai pas la revue. Je m’arrêterai devant certains hommes ; je ne raconterai pas leur vie et ne cataloguerai pas leurs œuvres, même celles que leurs compatriotes ont conservées. Je définirai, tout juste comme je les entends, autant que je puis les saisir, quelques côtés physionomiques de leur génie ou de leur talent. Je n’aborderai point de trop grosses questions; j’éviterai les profondeurs, les trous noirs. L’art de peindre n’est que l’art d’exprimer l’invisible par le visible; petites ou grandes, ses voies sont semées de problèmes qu’il est permis de sonder pour soi comme des vérités, mais qu’il est bon de laisser dans leur nuit comme des mystères. Je dirai seulement, devant quelques tableaux, les surprises, les plaisirs, les étonnements, et non moins précisément les dépits qu’ils m’auront causés. En cela, je ne ferai que traduire avec sincérité les sensations sans conséquence d’un pur dilettante. 
Il n’y aura, je vous en avertis, ni méthode aucune, ni marche suivie dans ces études. Vous y trouverez beaucoup de lacunes, des préférences et des omissions, sans que ce manque d’équilibre préjuge rien de l’importance ou de la valeur des œuvres dont je n’aurais pas parlé. Je me souviendrai quelquefois du Louvre et ne craindrai pas de vous y ramener, afin que les exemples soient plus près de vous et les vérifications plus faciles. Il est possible que certaines de mes opinions jurent avec les opinions reçues; je ne cherche pas, mais je ne fuirai point les révisions d’idées qui naîtraient de ces désaccords...