mercredi 19 octobre 2011

Reflets de New York, par Giulio-Enrico Pisani

Le Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek publie cet article de notre ami Giulio-Enrico Pisani :
Le fait que le titre original de cette exposition photographique peu commune de François van Bastelaer soit « Reflections of New York » (1), ne peut qu’encourager notre réflexion sur ce splendide collier de regards réfléchis par celle qui fut longtemps la première mégalopole et qui en reste encore l’archétype. New York et particulièrement Manhattan : la ville par excellence avec ses foules, son fracas, ses gratte-ciels, ses rues (streets) souvent ignorées du soleil, ses vastes avenues pulsantes, trépidantes, frénétiques même, sa mer de tôles roulantes et rutilantes, mais aussi ses parcs, ses lumières, ses mystères, ses petits squares romantiques, ses coins interlopes, son Village, ses gratte-ciels et j’en passe ! New York, la cité des cités, vous est présentée aujourd’hui à la Galerie « Espace 1900 » (2), comme vous ne l’avez jamais vue.
Et le galeriste de préciser dans son communiqué qu’« à travers le filtre des reflets, la moindre flaque devient une fenêtre sur un monde nouveau, la plus petite vitrine un tableau moderniste ; un simple miroir ouvre une porte plongeant au plus profond de la cité. Le réel n’est plus tout à fait le même et Manhattan apparaît différente. « Reflections of New York » fait découvrir au spectateur une ville (...) différente, presque virtuelle. Un peu comme si une cité parallèle s’offrait, furtivement, tel un monde caché ! » Et autant pour cette exposition, car l’artiste ne se contente habituellement pas de cet unique point de vue, disons réfléchi, qu’il nous fait découvrir aujourd’hui, nouvel aspect de La ville. Celle-ci est en effet omniprésente dans ses créations. Et de ses précédentes vues, comme « Brussels by light », présentée en 2009, « Les amoureux de Central Park », ou « Manhattan et le Brooklyn bridge by night » visibles ailleurs sur Internet, le démontrent.
Cette série bien particulière, que François van Bastelaer présente actuellement à l’Espace 1900, est sa manière, assez atypique est-il vrai, de nous prêter ses yeux, son regard donc, à travers le prisme de sa perception de la vie et de l’architecture new-yorkaise. « Photographe amateur », nous confie-t-il, « j’aime me promener dans les villes à la recherche d’images qui me touchent. Je fonctionne à l’intuition et au coup de coeur. J’aime les photos qui dégagent une émotion. Je suis heureux si mes sentiments transparaissent dans mes images ». Mais ce n’est pas tout, loin de là. Car sa dynamique, sa finesse de perception et son empathie avec l’homme et ses ouvrages, qu’il exprime avec une certaine complicité, mais sans esprit critique, excède grandement les simples coups de coeur d’amateur, aussi doué et éclairé soit-il. On est un peu plus dans le BCBG que dans le Weegee (3), c’est vrai, mais le raffinement dans sa recherche et l’incontestable réussite esthétique de ses tableaux photographiques placent François van Bastelaer dans un tout autre registre.
Très humains pourtant dans « American dream », « Femme dans l’escalier » ou « Départ immédiat », romantiques dans « Aube aquatique » et « Rendez-vous », les deux à la fois dans « Romantic park », ou purement mécaniques dans « Je n’ai besoin de personne » et « Last exit to Brooklyn », ses reflets se reflètent en nous et nous interpellent. Oserais-je vous dire, sans vouloir vous influencer, amis lecteurs, que mes préférés sont « Belle au bois dormant » et « Full frontal », deux chef-d’oeuvres marquant l’un le repos, l’autre le mouvement, c’est à dire les deux contraires, les opposés, les deux faces du New-York way of life. Je m’y arrêterai un instant. « Belles au bois dormant » est un portrait – retourné – de toute beauté des deux tours style baroque anglais du San Remo Building ou, plutôt, de leur reflet dans les eaux du « lac » de Central Park, au bord duquel se dresse cet immense immeuble résidentiel du début des années 1930. (4) L’ensemble architectural (véritable cité dortoir de luxe) qui se réfléchit au crépuscule dans le miroir frémissant de l’étang à travers et par-dessus les arbres qui en bordent la rive, donne justement cette impression d’île de paix, sécurité et sérénité au milieu des brisants d’un chaos citadin qui viendraient se fracasser contre sa quiétude horizontale.
À mille lieues (symboliques) de la tranquillité de Central Park, du miroitement de son lac et de ses « Belles au bois dormant », nous trouvons à présent leur contraire : « Full frontal ». Saisie sur le vif, une jeune femme élégamment vêtue se hâte en direction d’un sémaphore au milieu d’un carrefour désert traversé par un taxi jaune. Deux des panneaux fixés au sémaphore indiquent E 14 Street et 4th Avenue. Un grand immeuble brun occupe tout le côté droit, et une vaste paroi vitrée ou vitrine, côté gauche permet à toute la scène de se dédoubler, ses figurants convergeant avec leurs répliques réfléchies. Dans cette nouvelle scène fictive l’élégante jeune femme semble courir à une inévitable collision avec sa jumelle optique. Contrairement à un grand nombre d’autres travaux de l’expo, où il montre principalement, voire exclusivement le reflet du modèle, François van Bastelaer présente ici l’original, simultanément au reflet, en un ensemble « débout ». Résultat : la verticalité, les diagonales de fuite et le mouvement de la jeune femme évoquent la hâte, le stress, l’impatience, le temps qui s’envole.
Certes, presque toutes les photos de l’exposition sont géniales. Je pense notamment à cet homme en costume cravate qui téléphone dans « Déconnexion » (le reflet brisé, le contraire de la connexion !), à « stairway to heaven » (une allusion à l’échelle de Jacob ?), à « Silver City » et à bien d’autres. Et ce qui est remarquable de nos jours, où les photographes disposent d’innombrables outils techniques et numériques de modification, retouche et truquage, c’est le naturel des prises de vue, qui ne doivent leur magie qu’à la découverte et à la saisie à un moment donné, d’un sujet et d’un cadre soigneusement choisis par l’artiste. « Mes photos ne sont pas le fruit d’effets savamment pensés », explique François van Bastelaer. « J’aime que la ville me propose ses propres truquages, naturels, sans autre artifice que la conjonction spontanée des événements. Ce sont ces images éphémères que je tente de saisir pour les offrir au regard de chacun. Le reflet disparaît alors pour devenir une nouvelle réalité. »
De François van Bastelaer, nous apprenons par la galerie (et Internet) qu’il est né en 1964, vit à Kraainem dans le Brabant flamand, est directeur d’antenne de RTL TVI et gère l’autopromotion, le design et la continuité des trois chaînes télé du groupe RTL en Belgique. On lui doit notamment le design du journal télévisé ou les campagnes d’image « You are watching RTL TVI » qui ont marqué la communication de la chaîne en matière de série événements. Tout un programme donc... qui ne l’empêche nullement de se s’adonner à sa grande passion : la photographie. Auteur d’abord de photographies d’illustration, il a entamé avec le concept de « Reflections of New York » une nouvelle démarche plus artistique, peut-être plus intériorisée et – sans mauvais jeu de mot – réfléchie. Oui, peut-être, mais comment savoir ? Les reflets de ses perceptions via ses yeux et son objectif nous dévoilent-ils vraiment sur papier ses réflexions d’artiste ? Certaines sans doute ; toutes, sûrement pas. Affaire, pardon, artiste à suivre !
*** 1) Voir aussi sur www.reflectionsofnewyork.com.
2) Galerie Espace 1900 – 8 rue 1900 (entre rue Glesener et place de Strasbourg), Luxembourg gare, ouvert les jours ouvrables de 8h30 à 12h30 et de 14h30 à 18h30. Exposition jusqu’au 30 octobre.
3) Pseudonyme d’Arthur Fellig, photographe américain (1899 – 1968)
4) Voir notamment le site http://fr.wikipedia.org/wiki/San_Remo_Apartments ou, mieux encore, si vous lisez l’anglais, le site http://en.wikipedia.org/wiki/ The_San_Remo plus détaillé et mieux documenté.
Giulio-Enrico Pisani

22 commentaires:

Mahdia a dit…

Magnifique ! Tout ce que vous citez là , cher Giulio, je l’ai vu, les yeux écarquillés l’année passée en me rendant à un colloque qui se tenait à Fordham University . Avant de partir, je savais que je partais vers un espace de rêve – Et NY rêvé ou celui raconté ou vu à travers la télé par exemple est moins féerique que celui vécu réellement-, j’ai écrit un poème qui chante ma joie de la découverte au même moment d’une amitié superbe et de cette ville qui m’émerveillait avant de la découvrir.
En rentrant, non, là-bas même j’en ai fait l’éloge dans sept ou huit poèmes que vous lirez peut-être un jour. J’ai eu le soin de prendre énormément de photos, de faire une vidéo. J’en suis rentrée chez moi autre. On ne se lasse pas de la vie à NY. J’ai même assisté à Halloween et j’ai fait la connaissance de pas mal de "revenants" qui sont devenus mes amis. NY, c’est hallucinant. Impossible à raconter, il faut le / la voir et la dire poétiquement et artistiquement comme le fait ici votre artiste. Manhattan et son Times Square et Central Park et le reste, comment cesser de les imaginer et de les vivre ! La Statue de la Liberté m’a éblouie, non seulement à cause de son gigantisme mais aussi de ses galeries, et son histoire suivie pas à pas à travers son histoire en son, en image et en texte. Je retiens en plus de sa visite qui m’a épatée en tout, ce mot de son auteur Auguste Bartholdi : "My only ambition has been to engrave my name at the feet of great men and in the service of grand ideas."
J’ai promis de ne pas y revenir une deuxième fois seule. Je dois montrer ce que j’ai vu là-bas à quelqu’un de très cher.
Merci de m’avoir rappelé New York !

P.S. Vous m'ouvrez là un espace qui ne finira pas de m'enchanter. Je reviendrai pour lire de plus près votre bel article. Excusez-moi si je ne l’ai pas encore fait. En fait dès qu’on nomme New York, je tremble d’émerveillement comme devant certains poèmes et certains grands hommes et j'oublie tout le reste.

Isabelle a dit…

Merci, Giulio, je m'empresse d'aller voir cette exposition exceptionnelle.

La symbolique du miroir, tout un débat !

giulio a dit…

@ Mahdia: oui, ville splendide, fascinante et redoutable (par exemple le N.Y. de Tom Wolfe). J'ai visité Manhattan durant 15 jours il y a une dizaine d'années avec ma femme et mon fils. Le National museum, le Guggenheim, Central Park, Battery Park, Empire State builing, the Village, Chinatown, etc., etc...
Mais aujourd'hui j'aime la voir avec les yeux d'autrui, des artistes, des romanciers et des poètes.
Je ne m'y rendrai plus, car les américains & le compagnies aériennes (10-12 h. de no smoke dans un sens)ont rendu le voyage trop pénible et, de toute façon, il y a tellement d'endroits que je voudrais visiter qui sont bien plus proches et que je n'aurai plus le loisir de visiter non plus...
Mais profitez-en, vous, chère Mahdia, tant que la jeunesse saura vous faire voler au mépris d'un confort casanier dont je n'aime plus me passer!
Moi, je ne compte pratiquement plus voler que sur les ailes de mon empathie pour le monde et de mon imagination.

@ Isabelle : je suis impatient de connaître ton impression.
Notamment le monde de l'autre côté du miroir ? As-tu déjà songé à ce qui arriverait s'il cessait de nous singer en tout ?

Isabelle a dit…

Que c'est beau, Giulio, et effrayant ! L'autre soi dans le miroir ... Tant qu'il nous singe, et même s'en amuse, tout va bien !

Je te donnerai mes impressions dimanche. Bien entendu, elles seront mues uniquement par mon sentiment puisque je suis ignare dans la matière.

giulio a dit…

@ Isabelle : Parce que tu crois que je ne suis pas ignare, moi? Si tu lis attentivement l'article tu verras vite qu'il n'y là rien de professionnel, de technique, de cognitif; rien que de la prose, un peu de poésie, des impressions, de l'intuition, du feeling...

Isabelle a dit…

Malheureusement, je ne verrai pas l’exposition. La Galerie 1900 n’est pas ouverte le samedi, je confirme. J’aurais aimé me laisser happer, émouvoir par les photos, je me contenterai de les voir sur le site de la Galerie.

J’imagine le plaisir qu’a eu le photographe François van Bastelaer à capturer les images que lui offraient ces surfaces réfléchissantes. S’il est aisé de distinguer l’élément réflecteur pour certaines photos, pour d’autres, c’est moins évident et l’œil s’exerce en premier lieu à le découvrir. Miroirs, vitres, fenêtres, façades vitrées, carrelages, flaques d’eau, glace, lacs, capots de voitures, rétroviseurs, lunettes, instruments de musique, statue en métal poli, et j’en oublie. Et le résultat est étonnant ! Moins l’élément réflecteur est poli et plane, plus le reflet se voile et s’étire ou rétrécit, s’effrite, s’évapore, gondole, ondule, plonge, fond ou s’évade.

Certaines images surgissent de l’élément réflecteur de façon étonnante, comme le drapeau américain semblant être planté dans une flaque d’eau ou le buste d’un saxophoniste apparaissant de façon très nette hors du carrelage poli et humide. D’autres mettent en présence des éléments dont l’association est déconcertante, comme le reflet de l’enseigne « New York » sur une bouche d’égout ou la photo d’un arbre chétif, sans feuilles, que semblent éclairer des spots.

Certaines appositions éclairent sur une réalité double, élargie, complexe, parfois contradictoire. Ainsi la photo d’un homme seul, assis sur un banc avec son journal sous le bras, et dans les vitres une foule lui tournant le dos et admirant la ville au loin. Ou encore les vitres d’une voiture réfléchissant des graffitis renvoyant à une autre réalité.

Je passe sur ces magnifiques effets de miroirs dont tu as déjà fait mention, et que j’ai trouvés tous spectaculaires.

Et pour finir, je te donne en vrac quelques notes prises en consultant les photos : Reflet oblong, fuyant dans l’arrondi, convexe, en stries, disloqué, immatérialisé, fantaisiste, double, superposé, compacté, en suspension, vertigineux. Immeuble déraciné, ville vaporeuse, fantomatique, anarchique, féérique, en mal d’évasion, d’élan.

Une œuvre exceptionnelle dans l’ensemble, exquise, aux couleurs éclatantes, chatoyantes, d’une parfaite symétrie. C’est, comme tu écris, « une incontestable réussite esthétique ». J’aime beaucoup la formule « tableaux photographiques », car certains font réellement penser à des peintures.

giulio a dit…

Beau commentaire, chère Isabelle, observateur, pertinent, profond et senti. J'espère seulement que François van Bastelaer le lira (je lui ai signalé ce blog), car des commentaires comme ceux de Mahdia ou comme les tiens apportent des trésors qui ne peuvent qu'enchanter et immensément enrichir, par leurs multiples points de vue, facettes, rebondissements et interactions un article dont je suis heureux qu'il ait pu être le catalyseur de tout ce chatoiement.

Mahdia a dit…

Giulio,
Vous avez bien fait de dire qu’aujourd’hui vous vous adonnez au regard de NY à travers le regard des autres car NY est tout simplement un poème que, personnellement, j’ai sans cesse envie de lire et de vivre en lisant.
Je ne veux pas voir cette mégacité à travers un œil pessimiste même s’il ya à New York le revers de New York. En quelques jours dans cette cité splendide, j’ai pu remarquer que malgré tout, les newyorkais ( américains sans doute en général , je testerai bientôt les washingtoniens) se donnent sans limite à la joie de vivre et de rêver, et c’est de ce filtre magique qu’ils ont eux-mêmes concocté le rêve de cette ville lumière dans le regard de l’autre, cette cité, "la cité des cités" comme vous semblez passionnément aimer en la nommant ainsi et que François van Bastelaer montre comme une illusion dans la photo ( est-ce celle de Bastelaer ?) qui illustre votre texte sur Le Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek .
Un peuple d’une beauté intérieure singulière et leur joie de vivre m’a inspiré une très belle confiance . En moi, j’associe NY à une poésie qui n’arrêtera jamais de m’ébranler.
Et l’artiste magnifie encore plus NY à travers ce qu’il demande intuitivement à l’esprit de sa caméra, car ses " photos ne sont pas le fruit d’effets savamment pensés" comme il l’affirme, mais c’est là , dans cette image exaltée pourtant, exaltée " obligatoirement" - l’œil, je pense, c’est une évidence, ne sait pas voir autrement ce qui est naturellement exaltant- que ses habitants la jugent parce qu’ils ne veulent pas que leur effort de l’avoir bâtie ainsi en soit déconsidéré .
Il arrive, comme dans cette exposition que vous nous racontez formidablement, que c’est plutôt l’image qui, en s’adonnant à sa perfection "brute ", imite une facette de New York. NY est une illusion, mais vraie !
Merci, merci, vous me comblez en me donnant à écrire sur la beauté !

Isabelle a dit…

@ Mahdia et Giulio : Je profite de l'occasion pour vous exprimer toute mon admiration devant la beauté et la finesse de vos commentaires que je suis depuis un certain temps en lectrice de l'ombre.

C'est un véritable bonheur de vous lire !

giulio a dit…

@ Mahdia : combien de penseurs se sont penchés le mystère de l'autre côté du miroir. Tu fais mieux; tu entres dans le tableau, y participes et, à ta manière, celle de ton coeur, le réécris.

@ Isabelle, lectrice de l'ombre : il était donc temps que la lumière soit et que, enfin, tu nous y fasses participer.

Bonne nuit, mes amies! Je vais au dodo, car j'ai la maisons sens sus dessous et que demain une horde d'ouvriers m'obligeront à me lever à 6 h. Quelle horreur pour un retraité!

Mahdia a dit…

Isabelle, vous me comblez chère lectrice de l’ombre. Mais savez-vous que c’est dans l’ombre qu’on lit épuisement l’autre ?
Vos commentaires m’ont aussi bluffée. Votre écriture est si belle et si transparente qu’elle me rappelle un texte lu il n’y a pas longtemps sur ce blog, celui d’Isabelle Kronz . Un texte dont je ne cesserai pas de dire du bien. Merci infiniment de lire et d’apprécier ce que j’écris.

Mahdia a dit…

Giulio, merci pour tout et bon dodo et bon réveil GRAND Monsieur !
Quant à moi, je vais rester ce soir longtemps éveillée pour savourer la naissance d'une nouvelle Tunisie.

Isabelle a dit…

L’ombre, c’est la somnolence dans la brume aux abords d’un lac aux eaux tantôt limpides, tantôt troubles.

L’ombre, c’est la vie en retrait, loin des bruits de la ville, de son va-et-vient et de ses lumières artificielles.

L’ombre, c’est l’arrêt sur image, entre deux portes, deux directions ou sous un arbre, éveillant la conscience à un état intérieur, au sens de la vie.

L’ombre n’est pas la nuit. Le miroir renvoie une image vague, trouble, quelques contours, laissant survivre le doute et donc l’espoir, le rêve, peut-être une illusion.

L’ombre est un état de grâce qu’il faut quitter pour rentrer dans le jour sous peine de s’y enfoncer, de s’y perdre, et de s’y éteindre. Mais que le jour est cruel lorsqu’il impose la dure et froide réalité avec une précision telle qu’il anéantit le rêve, l’illusion et peut-être aussi certains espoirs !

Mais il révèle aussi certaines qualités et aptitudes, aussi modestes soient-elles.


@ Mahdia : Vous m’avez percée à jour, je suis bien Isabelle Kronz. Merci pour votre bienveillance en rapport avec mon écrit. Je ne connais pas la ville de NY, c’est avec un intérêt soutenu que je lis vos descriptions.

Pardon, je suis terriblement intriguée par votre question que je n’ai pas saisie : « Mais savez-vous que c’est dans l’ombre qu’on lit épuisement l’autre ? »

Au plaisir de vous lire prochainement, Mahdia et Giulio.

christiane a dit…

Le choc de deux regards et des commentaires...
http://brossegherta.wordpress.com/2011/10/23/new-york-roll/#comment-1720

Mahdia a dit…

Isabelle, comme je suis contente que vous soyez la Kronz !
Savez-vous que vous m’avez fait veiller pendant l’été et formidablement ? Je découvre votre excellente écriture et votre " bonhomme dans la neige" (dans Reviens Monsieur… !) m’a donné à méditer agréablement sur votre texte. J’en ai fait une lecture que je publierai bientôt. Si vous le souhaitez, je vous l’enverrai.
J’ai dit : j’en ai fait une lecture ? En fait j’en ai fait plusieurs car votre texte est d’une abondance infinie. C’est dans ce sens que j’ai dit que " c’est dans l’ombre qu’on lit inépuisablement" (au lieu de épuisement, je voulais " épuisamment". Je m’excuse pour la confusion) l’autre.
Dans l’ombre, c’est –à-dire de moi à moi, je vous ai lue sous toutes les facettes sensées ou insensées, ouvertes ou fermées, lisibles ou profondes que votre texte m’a données à explorer, mais quand on vient au jour, quand c’est le moment de parfaire l'écrit, il ne restera que ce que nous croyons être le "bon sens". Mais qu’est-ce que le bon sens en écriture ? ( n’est-ce pas la question qui sous-tend votre texte ?) .
C’est la première fois que je lis un petit texte d’une aussi étonnante épaisseur. Merci d’écrire aussi élégamment et heureuse de vous avoir rencontrée dans nos mots confondus.

Mahdia a dit…

Christiane,merci infiniment pour ce bon fil de "La brosse Gherta"!c'est ce que je cherchais vainement depuis longtemps.
Ouf, quel texte époustouflant de ce Nicolaï Lo Russo! je conseille sa lecture à notre chère Isabelle. Elle en saura encore mieux sur New York.
Votre commentaire ajoute un beau plus au texte.
Merci infiniment aussi à Jalel qui nous a déposés sur le pont de Manhattan et est reparti. Qu'est-ce qu'on fait ? On l'attend ou on
rentre sans lui?

Isabelle a dit…

Mahdia, vous me comblez ! Je trépigne d’impatience de lire votre lecture de mon texte. C’est un grand honneur que vous me faites. Cependant, je laisserai votre question concernant le bon sens en écriture ouverte, et la promesse d’y revenir après vous avoir lue, si vous le désirez.

Merci Christiane pour ce délicieux tableau de « Nouyorque » (La plume de Nicolaï est tout simplement exquise !). En effet, cette description, votre commentaire et ceux de Mahdia ici me donnent une idée plus précise de cette ville et l’envie de la voir de mes propres yeux. Je comprends mieux la fascination que peut susciter NY.

christiane a dit…

Vous êtes "extra" toutes les deux -comme disent mes grands petits-enfants ...! Quant à Giulio, quelle plume !
Jalel.... il doit être dans sa ville avec ses amis et ses étudiants, écoutant, réfléchissant, silencieux ou de sages conseils....

François van Bastelaer a dit…

Merci pour ces commentaires sur mes photos. Je suis très touché que vous puissiez y trouver tant d'inspirations. Ces photos représentent beaucoup pour moi et les voir ainsi évoquées est un vrai bonheur. Comme je le lui ai dit, j'ai beaucoup aimé l'article de monsieur Pisani. Je le trouve profond et très juste dans la perception de mon travail. Quelle joie de voir ainsi mon travail, que j'aime (même si je doute énormément quand je le regarde) être apprécié par d'autres. La lecture de vos commentaires, Isabelle et Mahdia, n'a fait que renforcer ce sentiment magnifique et je vous en remercie. Vous avez un regard très fin, très perspicace et très vrai sur mon travail. Merci
@Isabelle, j'étais à la galerie cet après-midi. L'expo est prolongée d'une semaine et Robert, le galeriste m'a dit de ne pas hésiter à le contacter pour prendre un rendez-vous pour venir voir l'expo qu'il ouvrira pour vous, même le weekend. Et sinon, le jeudi 3 novembre, il y aura ouverture nocturne.
Amicalement,
François van Bastelaer

www.reflectionsofnewyork.com

Mahdia a dit…

@François van Bastelaer
Je me suis rendue tard dans la nuit à votre exposition virtuelle sur votre site et là, je n’ai pas peur de vous dire que je reste jusqu’à ce moment où j’écris ce commentaire sans voix au sens propre du mot !
Je vous crois lorsque vous dites que l’image n’est pas truquée malgré que ce que votre camera a pris n’est pas le véritable réel, celui que le monde de la perception sensible nous impose du moins . Le secret ou l’astuce est dans votre regard pénétré de la performance de votre caméra.
C’est étrange, plutôt c’est génial comme le regard peut échapper quand il veut au diktat de l’esprit. Les surréalistes ont vu juste lorsque dans les années vingt déjà ils liaient la recherche du sublime au développement ou à l’ouverture des sens à leur intuition.

Là, je comprends plus votre mot : "Mes photos ne sont pas le fruit d’effets savamment pensés" et j’entends par là " intellectuellement organisés" comme diraient encore les surréalistes en parlant de l’écriture automatique, et j’avais raison de dire (avant que je ne visite votre galerie d’ailleurs) que c’est par l’ intuition de votre caméra que vous réagissez à l’objet que vous filmez . Je pense qu’ici le regard se jette sur la chose comme par instinct, il réagit, je n’ai pas honte de dire "animalement" à la chose. Et toutes ces déformations non voulues, c’est-à-dire non conscientes, de la réalité sont dues à un regard véridique de lynx dans la précision de détecter le mouvement le plus subtil dans l’objet de votre attention, et c’est génial !
"La valeur de l’image, dit Breton, dépend de la beauté de l'étincelle obtenue" , et c’est sans doute ce que vous avez intuitivement, au hasard, aimé prendre, souhaitez révéler et le merveilleux naît je pense ( dans votre art déjà) quand la chose captée et réalisée répond affirmativement à l’amour intuitif de la chercher et de la trouver.

Vos photos sont sophistiquées mais par l’œil manipulé par son propre œil. Ici l’artiste avec toute sa culture n’a rien à apprendre à son art car c’est par "hasard", par conviction spontanée qu’il dresse comme un odorat hyper développé du rat (300 fois plus performant que celui de l'homme ) son regard face à l’objet convoité.Là, il capte avec finesse et précision et il clique , sans prendre le temps de penser à une allure précise et ca donne ce que vous avez superbement photographié à NY.

Je m’excuse si mes réflexions sur votre art magnifique trouvent leur logique dans des exemples pris chez l’animal, mais je pense que celui-ci a beaucoup à nous apprendre sur nous-mêmes.

Combien j’aime encore plus aujourd’hui NY à travers votre regard ! Tout simplement merci !

@ Giulio, merci infiniment de nous régaler infiniment des trésors que vous savez ingénieusement capter dans ce monde qui nous envie souvent l’instinct du beau.

Isabelle a dit…

@François Van Bastelaer: Je ne manquerai pas de me rendre à votre exposition la semaine prochaine. Ce sera l'occasion d'y aller en famille. Je suis impatiente de savoir comment vos oeuvres seront ressenties par ces jeunes gens. Merci infiniment de nous offrir cette occasion.

@Mahdia: Je me joins à vous pour remercier Giulio qui a été le "catalyseur de ce chatoiement" et l'occasion de découvrir de si magnifiques oeuvres. "L'instinct du beau", magnifique !

christiane a dit…

@François van Bastelaer
revenant de votre blog je suis éblouie par ces lumières bondissantes sur tant de miroirs réels ou cueillis au gré de vos regards dans cette ville qui devient sortilège... Atlantide... Beauté extrême. Merci.