Oeuvre d'Adam Dafalla. (Soudan)
Voyage : quête de cette contrée où l’altérité jouxte l’ipséité et où l’autre revient au même. Le voyage ? Cela qui rend manifeste la diversité et qui, pourtant, laisse voir à chaque fois que cela est semblable au même. L’autre revient au même assène le voyage. C’est sans doute ce qui explique en partie le spleen baudelairien que le voyage ne fait qu’accentuer.
Mais à la signification funeste du « Voyage » baudelairien, je préfère de loin la jubilation ou la persévérance des grands voyageurs. Je pense à Khusraw, ce voyageur persan qu’on ne lit plus depuis des siècles. Pendant sept ans, il a parcouru le monde, comme on parcourt un livre. Il cherchait une réponse à des questions comme : pourquoi cela est-il ? Que faut-il regarder ?
Mais à la signification funeste du « Voyage » baudelairien, je préfère de loin la jubilation ou la persévérance des grands voyageurs. Je pense à Khusraw, ce voyageur persan qu’on ne lit plus depuis des siècles. Pendant sept ans, il a parcouru le monde, comme on parcourt un livre. Il cherchait une réponse à des questions comme : pourquoi cela est-il ? Que faut-il regarder ?
Nassir Khusraw
L’enjeu ontologique de ces questions n’empêchait pas Khusraw (celui d’avant le rêve qui causa sa conversion, celui qui alla à Maarat Noaman pour y rencontrer le grand poète Maari) d’aimer la soie, la poésie, le vin, les belles femmes et les merveilles du monde.
Le meilleur voyage : celui qu’on n’a pas entrepris, sans doute parce qu’il est affecté d’un coefficient désir qui l’inscrit dans une perspective de quête, d’appétit dira Baudelaire :
« Pour l’enfant amoureux de cartes et d’estampes,
L’univers est égal à son vaste appétit »
C’est sans doute pour la même raison que Baudelaire situe le référent de « L’Invitation au voyage » dans un pays qu’il n’a jamais visité : La Hollande.
Pourtant, il n’y a rien de plus exaltant que la découverte. Rien de plus engageant que la consistance du réel. Je voudrais dire avec Kenneth White, ce grand voyageur : « je préfère de loin les îles réelles aux îles imaginaires, tout comme je préfère les documents bruts aux versions romancées. »
Pourquoi voyage-t-on ? Pour voyager. Telle est la réponse baudelairienne car, pour le poète, le véritable voyage se passe d’alibi. Il est la réponse à une injonction venant de je ne sais où :
« Mais les vrais voyageurs sont cela seuls qui partent
Pour partir… »
Je reviens à Khusraw qui voyageait pour trouver du sens, des images correspondant à ce sens. Ecrivant ce texte, je n’ai pas cessé une seconde de penser aux rafiots de la mort. Cette jeunesse que la mer engloutit entre l’Afrique et l’Europe. Pour eux, le voyage est un mal onéreux né d’un rêve transformé en cauchemar.
L’enjeu ontologique de ces questions n’empêchait pas Khusraw (celui d’avant le rêve qui causa sa conversion, celui qui alla à Maarat Noaman pour y rencontrer le grand poète Maari) d’aimer la soie, la poésie, le vin, les belles femmes et les merveilles du monde.
Le meilleur voyage : celui qu’on n’a pas entrepris, sans doute parce qu’il est affecté d’un coefficient désir qui l’inscrit dans une perspective de quête, d’appétit dira Baudelaire :
« Pour l’enfant amoureux de cartes et d’estampes,
L’univers est égal à son vaste appétit »
C’est sans doute pour la même raison que Baudelaire situe le référent de « L’Invitation au voyage » dans un pays qu’il n’a jamais visité : La Hollande.
Pourtant, il n’y a rien de plus exaltant que la découverte. Rien de plus engageant que la consistance du réel. Je voudrais dire avec Kenneth White, ce grand voyageur : « je préfère de loin les îles réelles aux îles imaginaires, tout comme je préfère les documents bruts aux versions romancées. »
Pourquoi voyage-t-on ? Pour voyager. Telle est la réponse baudelairienne car, pour le poète, le véritable voyage se passe d’alibi. Il est la réponse à une injonction venant de je ne sais où :
« Mais les vrais voyageurs sont cela seuls qui partent
Pour partir… »
Je reviens à Khusraw qui voyageait pour trouver du sens, des images correspondant à ce sens. Ecrivant ce texte, je n’ai pas cessé une seconde de penser aux rafiots de la mort. Cette jeunesse que la mer engloutit entre l’Afrique et l’Europe. Pour eux, le voyage est un mal onéreux né d’un rêve transformé en cauchemar.
9 commentaires:
A l'heure du café, de la maison tiède, des nôtres tout chiffonnés de sommeil, du jour qui se lève encore frileux, le voyage vient distiller sa sève de désir, un peu trop tôt...
Il faudra attendre cette heure grise du jour où de glissera comme un soupir la fatigue des habitudes, ce quotidien que nous ne voyons plus dans toute son immense pesanteur, dans ses entraves,... Pourtant, ces humbles qui guettent notre sourire, notre présence, cette maison aimée et ces petits objets devenus soudain, invisibles... Nous ouvrirons le livre interdit, le livre du désir d'ailleurs, d'abord comme un long voyage immobile dont le sillage onirique nous délivre de tout l'inassouvi, le temps d'un soupir. Puis le désir de voyage reviendra, plus vorace, dans notre imaginaire engloutissant les livres, les écritures, les rêveries... Oserons-nous être imprudents ? prendre le risque du vrai départ ? Quitter nos sécurités, nos aimés ? partir à l'aventure, à la rencontre du réel ?
Et se faire disponible pour entrer dans l'altérité, ne plus savoir... "couper le temps avant qu'il ne nous coupe", celui de l'habitude, du familier, du connu...
Entrer dans la lenteur sans préjugés, suavement, épouser l'espace, les paysages, l'Autre. Se déconstruire, réinventer le vovabulaire des lieux,d'un visage, d'un paysage, les feuilleter comme un livre qui deviendrait notre terre nouvelle, comme un voyage au fond de notre âme; avancer sur cette lisière qui me sépare de l'Autre et l'éprouver et s'éprouver.
Avancer dans sa quête mais penser à ceux pour qui il n'y aura pas de retour, ceux pour qui le voyage deviendra exil douloureux, périlleux, ceux que la mer effacera comme leur chant de misère devenu inaudible...
Puis le retour ...sagesse et lucidité...Valeur ravivée de la présence de ceux que nous avions quittés et qui sont nos racines, notre vivre, notre lieu, notre identité et garder au fond du coeur, peut-être ... un visage de là-bas, du pays du désir...
Christiane , de pas-sage...
je n'ai pas eu besoin de prendre la mer pour partir et voyager, un simple clic sur un message laissé et pour lequel je vous remercie, m'a permit de visiter votre antre, et découvrir à travers votre pensée, un moyen de m'évader. Un grand merci.
Vous lire nous fait toucher la peau du monde.
Voyager c'est faire de l'imprévu une aimable pratique, c'est aussi échapper à l'emprise des livres, même si on en emporte.
Voyager c’est partir de chez soi. Certains partent donc en espérant trouver ailleurs la réponse à leur malaise existentiel ou ils partent simplement pour oublier leurs soucis. Dans les deux cas, ils se retrouvent déçus car leur questionnement ontique reste le même sous toutes les latitudes et quant aux soucis qu’ils ont fuis, ils les retrouvent devant eux à l’autre bout de la planète. Ces voyages ne sont pas de vrais voyages, ce sont des fuites.
Le vrai voyage suppose un bon équilibre intérieur préalable doublé d’un désir de rencontrer l’autre (sa culture, ses paysages, etc.).
Votre remarque sur le drame des embarcations d’immigrés me fait prendre conscience que le voyage suppose le retour. Dans leur cas, il n’y pas de retour possible, même pour ceux qui ont survécu aux dangers de la mer. Ils rêvent d’un pays enchanté (qui n’est qu’un rêve) où ils croient que toutes leurs aspirations vont se réaliser. Ce ne sera évidemment pas le cas. Pour eux, ce voyage est en fait un exil, autrement dit l’abandon de leur propre culture.
Non, un vrai voyage suppose toujours un retour, même s’il st éloigné dans le temps. On revient plus riche des expériences qu’on a faites. Rimbaud le savait bien, qui disait :
Je regrette l'Europe aux anciens parapets !
(…)
Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !
Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.
Et voyager c'est aussi découvrir que sa propre culture est arbitraire. Par là je ne veux pas signifier qu'elle est forcément mauvaise, mais simplement qu'elle offre une lecture du monde parmi bien d'autres lectures possibles.
"voyager n'est pas guérir son âme "
trés joli texte , trés évadant et suggestif ...
merci à vous
L'écrivain et philosophe transcendantaliste Americain"Ralph Waldo Emerson"a dit à propos du voyage:"bien que l'on voyage à travers le monde à la recherche de la beauté,si elle n'est pas en nous,on la trouvera pas."
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