samedi 9 mai 2009

Réaction de Gaspard Hons


Nicolas Poussin : L'Inspiration du poète

Je reçois à l'instant la réaction de notre ami Gaspard Hons à mon billet et aux réactions de CP et de Giulio-Enrico Pisani. Merci Gaspard.

Voici quelques fragments “ramassés” dans le beau désordre par un esprit ne suivant aucune piste, un rien coq-à-l’âne. La matière est tellement dense pour “ esprit “ qui vagabonde.
Méditation sur la pensée en la pensant. Je me vois en train de penser. Suis-je déjà hors de moi, me suis-je sorti de moi-même? Je suis parfois le moteur, d’autrefois je suis lancé par le moteur. Le moteur propulse-t-il, suis l’objet propulsé. Le mouvement, la matière ? Comme pour le “vide”, le mouvement, la matière sont-ils habités? Cette question Juarroz la pose dans ses poèmes. Je voudrais toucher comme je touche la matière, le mouvement.
La réaction de CP, corps-mémoire, sa trace invisible ne va-t-elle pas en ce sens, il rejoint l’ami Jalel. Se passer d’alibi. Ne rien rejoindre, en rejoignant (en me rejoignant). Quelque chose fait signe, la pensée me fait signe, elle est déjà signe.

Le bonheur de la pensée, écrit encore Jalel l’ami lointain, pourtant si proche, je l”enferme dans ma cabane intérieure, qui déjà m’enferme. Je suis prétentieux, de là je parle au monde, tout en me parlant. Je parle en silence.
Giulo (j’ai marché longuement à Rome), j’y ai tracé un sillon avec ma charrue archaïque et imaginaire (comme les frères Rémus et Romulus) Ritte était là, je l’ignorais, je n’en avais pas conscience. Giulo a fait le rapprochement (j’en suis ému) ( il me reste quelques exemplaires de ma traversée labyrinthique de Rome - je donne à qui le désire avec plaisir)

Je trace sans arrêt le sillon qui est déjà devant moi. Je m’inscris actuellement dans la recherche de la rose du temps. Le temps, la rose, le sillon, la charrue bien-aimée, l’être.
Je déteste parler en JE, je préfère le TU. J’ai abusé du JE, je m’en excuse.
Que dire, merci et amitié.
Gaspard

6 commentaires:

christiane (cp) a dit…

Que de bonheur, cher poète, à vous lire dans cette modestie qui ne peut réduire ce grand voyage au pays des mots, au pays de la langue oubliée.
Pour vous et parce que je pars demain vers le soleil je signe de mon prénom. Enchantez nos silences par votre écriture où s'ombre la lumière et le silence de la musique. Vous lire me donne le vertige, cette douceur de la chute dans la neige du verbe.
Bonne route d'amitié à tous.
Je vais aux champs d'écume chercher un épi d'or.

giulio a dit…

C’est vrai cher Gaspard, j’eus dû. J’eus dû lire « Ly's light » avant de naître cinquante-sept ans plus tôt dans la ville de toutes les splendeurs et innombrables trahisons. Mais en 2002, lorsque ta Nadia apparut au monde, je ne courais même plus après Béatrice et ne présentais pas encore de livres pour « mon » dernier journal à ne pas encore m'avoir éjecté pour non-conformité à sa ligne. Ergo, je ne te connaissais pas encore et ne t’ai découvert qu’avec Ritte. Et j’eus dû lire « Une autre épiphanie du désir » où le 16 août 2002 Jalel présentait brillamment « Ly's light » au lectorat du Lëtzebuerger Land, ce périple romain que tu évoques et que je ratai une fois de plus. Que veux-tu, toute vie est faite d'occasions manquées; pourquoi les regretter? Quoi de plus normal qu'un papillon envolé. Reste après coup un peu d’amertume, bien sûr. Tout comme l’esprit de la ritte disparaît du Condroz, l’âme de ma ville natale sombre dans le passé, la poussière du tourisme de masse, la vulgarité mercantile et l’absence de création. Or j’aimais son âme bien plus que ses monuments et ses fontaines pris individuellement, tout comme on aime une femme et non son nez + ses yeux + ses bras + etc. Et son arôme est un tout…

(Odeur d'herbes sèches!
Parfum de romarin!
Béate, la louve lèche
la lymphe amère du pin.

La poussière des marbres d'hier,
et le chant des gestes passées
l'étalent près des cimetières
aux yeux d'inconnus blasés.

Dis-moi Rome, comme elle est belle
et blanche cette jambe élancée,
dont, entre mauve et chanterelle
la ronce tire un collier de pensées!

Pensées de rubis perlant sur ta peau nue,
séchées par les caresses premières:
"touche-moi" des amoureux étendus
dans l'herbe blanchie par les pierres!

Dénudée, lascivement étendue,
depuis deux mille ans tu te donnes,
maîtresse d'amants jamais déçus,
aux maîtres jamais ne pardonnes.

Pupille mystérieuse des étoiles
tu accouples au chant de la fauvette
la stridulation des cigales
et embrasses par milliards les gouttelettes

d'un voile au tissu éphémère
dissimulant mystiquement
de Source l'envoûtant cratère
qu'arrose la flûte de Pan.

Et Venus livre, là où je tiens
le visage, où l'amour se noie,
où il tinte, fol et argentin,
son rire d'amour à ma joie.

Souveraine, un peu jalouse tout de même, Lune recouvre de son manteau étoilé la belle gisante, pendant que le Tibre fidèle serpentant entre ses membres lascifs offerts, vaporise des myriades de baisers humides sur la chair indifférente de ses pierres millénaires.)

… un tout, oui, mais qui s’évanouit. Ravi de t'avoir rencontré, cher Gaspard, du moins, en écriture,
et accepte mes amitiés en attendant de pouvoir peut-être un jour les mettre au singulier.

gmc a dit…

"Méditation sur la pensée en la pensant. Je me vois en train de penser."

non, vous vous - pour faire simple mais, en fait, plutôt une idée que vous appelez "moi" sans trop savoir pourquoi - imaginez en train de penser...sachant qu'il est impossible à un individu présumé de stopper le mouvement de pensée.
je pense ou je suis pensé? bonne question^^

giulio a dit…

Comment ignorer, gmc, sous le manteau du poète, les questionnements
du philosophe? Lorsque toute poésie est philosophie, le philosophe dit moins en vers que contre tout.
Tout comme Gaspard, celui du jour, bien sûr, pas l'autre, pas l'alchimiste de Pierre Vicot, mais l'alchimie honsienne, où le rite devient ritte qui retourne le toi en moi, ou géraldienne "Pourquoi ces mots qui nous opposent: le tien, le mien, le mien, le tien?"
Comment pourrait-on ne pas abuser du JE, du MOI ? Lorsqu'en en abusant de TOI, LUI, ELLE, VOUS, EUX, ELLES on risque la prison commune.
Comment ne pas abuser des J', JE, MOI, ME, MON, lorsque ces pronoms sont les seuls qui cernent correctement notre misérable condition de séquestrés à vie dans le sac de peau qui nous enserre?

gmc a dit…

ciao giulio,

sous le manteau du poète, que du vent, dont le sourire regarde le philosophe barboter dans l'écume.


"notre misérable condition de séquestrés à vie dans le sac de peau"

s'il te plait, giulio, un peu d'oreille: depuis la nuit des temps, l'art raconte exactement l'inverse.

alors, ces marques de royauté que sont "mon, ma, mes, le mien, moi, etc" ne sont que chaînes endossées par des volontés auto-proclamées propriétaires...ha, la gourmandise^...d(*_*)b

giiulio a dit…

Pitié Gilles Marie! Pitié!
Ne tire pas sur l'avocat...
du diable et épargne les con(s)vaincus!