John William Waterhouse : Windflowers
Si, comme aux vents désignés par la rose...
Si, comme aux vents désignés par la rose
Si, comme aux vents désignés par la rose
Il est un sens à l’espace et au temps,
S’ils en ont un ils en ont mille et plus
Et tout autant s’ils n'en possèdent pas.
Or qui de nous n’imagine ou pressent,
Ombres vaguant hors des géométries,
Des univers échappant à nos sens ?
Au carrefour de routes en obliques
Nous écoutons s’éteindre un son de cor,
Toujours renaissant, toujours identique.
Cette vision du ciel et de la rose
Elle s’absorbe et se dissout dans l’air
Comme les sons dont frémit notre chair
Ou les lueurs sous nos paupières closes.
Nous nous heurtons à d’autres univers
Sans les sentir, les voir ou les entendre
Au creux été, aux cimes de l’hiver,
D’autres saisons sur nous tombent en cendre.
Tandis qu’aux vents désignés par la rose
Claque la porte et claquent les drapeaux,
Gonfle la voile et sans visible cause
Une présence absurde à nous s’impose
Matérielle, indifférente et sans repos.
Robert Desnos 1943
7 commentaires:
Merci Jalel!
Cette présence absurde que nous croisons en des endroits parfois incertains...
De quel recueil est extrait ce très beau texte, nervalien, en quelque sorte, dans la production de Desnos?
Meilleurs voeux à vous et à tous ceux qui passent ici!
Sylvie D.
@ Sylvie D. Ce texte fait partie des poèmes publiés dans des revues clandestines en 43-44 et qui ont été regroupés sous le titre "Ce coeur qui haissait la guerre" section du recueil Destinée arbitraire. nrf Poésie/Gallimard.
Oui, ce poème a des accents nervaliens. Desnos tenait Gérard de Nerval pour le poète "de qui il faudra bien repartir pour se libérer de Mallarmé, de Rimbaud, de Lautréamont"
Meilleurs voeux à vous aussi.
bonjour,
ce tableau de Jonh William Waterhouse, charmant, m'évoque deux toiles du peintre américain Hamilton Hamilton (1847-1928) : "Falling Apple Blossoms" et "The Farewell", ainsi que la voix de la mezzo-soprano Katherine Kelton chantant les "Lieder" d'Amy Beach. Douceur et mélancolie.
Quant au poème de Robert Desnos, écrit en... 1943... Il fait mal, surtout en son final. Comme à tous ceux qui s'interrogent et interrogent le ciel obscur... même en temps d'étoile guidant les rois mages...
C'est une belle page.
Bonne année aussi à tous les hôtes de votre jardin et ... au jardinier !
Merci, chère Christiane, pour cette évocation synesthésique. J'aime beaucoup le "Falling Apple Blossoms" : douceur, tendresse et promesses.
Amicalement
oui, Jalel il m'arrive souvent de croiser les sons et les couleurs, les mots et les odeurs. J'aime jouer du piano à cinq sens et tresser l'un avec l'autre, les mettre en correspondance. Ces mots, ils nous révèlent notre mémoire et celle-ci nous est offerte par mille et une sensations harmonieuses.Encore Baudelaire...
"Harmonie du soir" /Spleen et Idéal.
"Voici venir le temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige...."
et voilà qu'ils dansent avec votre billet précédent...
Desnos m'émeut au plus profond de moi et me rappelle cette triste mélodie où Vigny chanta la souffrance qu'il connaîtra lorsque son tour viendra de résilier sa vie, mélodie que, sacrilège, je massacre en rempaçant dans la première strophe le premier vers par le dernier du poème:
"Dieu! que le son du Cor est triste au fond des bois!
Soit qu'il chante les pleurs de la biche aux abois,
Ou l'adieu du chasseur que l'écho faible accueille,
Et que le vent du nord porte de feuille en feuille."
Nos poètes me pardonneront-ils
?
Bonne et heureuse année à tous!
.
P
Merci pour ce rapprochement entre Desnos et Vigny. Tu montres ainsi que la lignée romantique s'est poursuivie jusque dans les arcanes du surréalisme
amicalement
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