mercredi 27 janvier 2010

Une voix d'Iranمريم حيدري


Maryam Haidari (née en 1984) est une jeune poétesse iranienne qui écrit aussi bien en persan qu'en arabe. Elle chante la femme. Sa voix a des inflexions qui surprennent dans son contexte social. C'est une voix libre qui chante la femme.



كما طفلة

بالغت في الشكاوي الجميلات في آخر الليل
ثم للنوم قد خلدت ببكاء صغير
و في الصبح قد وجدت عبرة ما من الليلة البارحه
تراودني نزوة أن أراجع كلَّ السطور
التي شاركت وحدتي في الغياب الكئيب
و أرجعَ عشر سنين وراءً
فنجلس حتی نمارس شطرنجنا في شجار لطيفٍ
و أقبل كل الشروط بغير رضی
و في هذه الليلة بالذات أشتاق
أن أضع الرأس فوق صدرك
نغدو صغيرين أروع من حزننا
ثم نبكي كلانا قليلاً من الليل حتی أقبّلَ عينيك ثمّ أنام
كما أن بي هوساً بارزاً أن أغيب عن الوعي يومين
أو أن نتجرع كأس الممات معاً
ثمّ أن يرشفوه الذين نكنّ لهم في قرارات أنفسنا الحبَّ
كلُّ الذين يحبّوننا
فنصير علی هيأة الروح
مبتسمينَ، ذوي نعمة و خفيفين
أحبّ التقمّص في من تحبُّ
لآتيك بعد السنين التي انصرفت
ذاتَ يوم
أناديك باللقب العاطفيّ الجميل
أقول لك: «اليومَ أشعر أنّي أحبّك
أشعر أنّ يديّ تروم ملاطفة من يديك
و إنّ بوسعي حبَّك حتی نهاية هذا الأصيل.»
و ثمّ أغيب عن الوعي قبل المساء
و فضلاً عن الوهم
في هذه الليلة بالذات أشتاق أن أتخلّص من أي حلم
و أحنو برأسي علی صدرك الطلقِ
ثمّ أنام
مريم حيدري




Comme une enfant
Comme une enfant ayant abusé de douces plaintes vers la fin de la nuit
Puis, pleurant un peu, et se réfugiant dans le sommeil
Trouve au réveil une larme de la veille
Me revient comme un caprice le désir de revoir toutes les lignes
Qui ont partagé ma solitude dans la triste absence
Et je reviens dix ans en arrière
Et nous voilà assis pour une partie d’échecs avec de gentilles querelles
Et de mauvaise grâce j’accepte toutes les conditions
Cette nuit précisément j’ai envie
De poser ma tête sur ta poitrine
Nous devenons enfants plus splendides que notre tristesse
Chacun de nous pleure un bout de la nuit jusqu’à ce que je t’embrasse sur les mots et que je m’endorme
Comme si l’idée de perdre connaissance deux jours entiers était une obsession saillante
Ou celle de mourir ensemble
Et qu’ensuite ceux que nous aimons boivent à la même coupe
Tous ceux qui nous aiment
Et nous aurons ainsi la forme de l’âme
Souriants, épanouis et légers
J’aime m’incarner en ceux que tu aimes
Pour revenir vers toi après ces années parties
Un beau jour.
Je t’appelle par ton beau surnom affectueux
« Aujourd’hui, je sens que je t’aime » te dis-je
Je sens que mes mains aspirent à une caresse de toi
Et je peux t’aimer jusqu’à la fin de l’après-midi
Et je perdrai connaissance avant le soir
Plus que de cette chimère
J’ai besoin cette nuit précisément de m’affranchir de tout rêve
De pencher la tête sur l’étendue de ta poitrine
Et de m’endormir.


(Traduction Jalel El Gharbi)

16 commentaires:

giulio a dit…

Quel splendide poème, Jalel!
Mais où/comment as-tu trouvé cette perle, inexistante sur le Net

on ne trouve qu'une homonyme physicienne de l'Université de Koweit et une autre (ou la même?)psychologue/psychiatre à l'université de Ahvaz (Iran)

Autres poèmes? Recueils? Publications poétiques?

Jalel El Gharbi a dit…

Cher Giulio : effectivement il y a peu de traces de Maryam Haidari. Je ne pense pas qu'elle soit psychologue parce que c'est une littéraire (Mastère en littérature arabe). Elle est de la région de Ahvaz, région arabophone de l'Iran et où il y a tant de poètes. Il y a quelques poèmes d'elle sur le Net ou dans la revue Chiraz qui publie les poètes iraniens d'expression arabe (revue qui ne nous parvient pas ou difficilement). Maryam Haidari a fait l'objet de plusieurs articles dans les journaux du Qatar et des Emirats qui lui ont publié quelques poèmes.
Je me renseigne pour savoir si elle a publié des recueils
Amicalement

Feuilly a dit…

Magnifique en effet. Mais quels rapports la Perse entretient-elle avec le monde arabe? Je veux dire, le rapport de langue, de culture... C'est l'islam qui unifie tout? Un Iranien connaît-il d'office l'arabe? Quelle langue est enseignée à l'école? Mes questions peuvent sembler simplistes, mais l'Iran est un pays qu'on connaît mal, en Occident (ou alors il est diabolisé dans la presse).

La petite librairie des champs a dit…

Il y a aussi la magnifique Farrokhzad morte très jeune à 33 ans mais qui a laissé de très beaux textes, le recueil Saison froide chez Arfuyen par exemple.
"J'ai froid
J'ai froid à tout jamais
O ami, unique ami
"Mais ce vin-là datait de quand?"
regarde comme le temps est lourd ici
Regarde comme les poissons mangent ma chair
Pourquoi me maintiens-tu au fond des mers?

J'ai froid et je déteste les boucles d'oreille en perle
J'ai froid
Et je sais qu'il ne restera que quelques gouttes de sang
De tous les fantasmes rouges un petit pavot."
Une vie douloureuse et active en poésie qui s'interrompt brutalement en 1967.

Jalel El Gharbi a dit…

@ Feuilly : effectivement le plus où l'on vénère le plus au monde la poésie est diabolisé. Le pays de Hafez, de Ferdawsi, de Khayam et surtout de Rumi (né à Herat dans l'actuel Afghanistan), le pays du grand maître Behzad (peintre)est diabolisé. Voila où nous en sommes !
A l'époque abbasside, tous les poètes persans étaient bilingues. Et il n'est pas rare de trouver des vers ou des poèmes en arabe chez les grands poètes persans. La Perse a donné aux lettres arabes de grands noms (Abu Nawas notamment). Aujourd'hui, l'arabe est surtout la langue du Coran et il est enseigné comme tel. De nombreux iraniens le parlent. Al Ahwaz (Ahvaz) -littéralement banlieus- étaient naguère appelé Arabstan (pays des Arabes) est une province arabophone. Il semble que les tensions entre Arabes et Perses qui prévalaient au temps du Shah ne sont plus qu'un mauvais souvenir.
Concerant l'islam ; l'Iran est un pays chiite qui entretient d'excellentes relations avec les chiites de Syrie, d'Irak, du Liban. Les relations ne sont pas aussi bonnes avec les sunnites malgré l'importance des échanges culturels.
@ La Petite librairie des champs : Superbe. Ajoutons que Farrokhzad fut une figure culturelle importante comme en témoigne le film que lui a consacré Bertolucci.
Merci

christiane a dit…

Elle entre dans le présent de son passé, dans l'enfance de l'écriture. Tendresse d'un désir qui ressemble à du silence. Cette écriture traverse l'obscurité de son histoire de femme. Elle écrit entre veille et sommeil, lumineuse dans un territoire d'interdits. La lune d'eau y porte le même nom de source que la nuit.Coupole bleue de l'enfance offerte. Vibration entre des mondes opposés dans les premières lueurs de l'aube. Un coeur de femme devient étincelle et douceur contre l'oppression.

Jalel El Gharbi a dit…

Lumineux votre commentaire, chère Christiane. Il me fait penser à un poème de Pavese.
Amicalement

christiane a dit…

c'est qu'il y a dans ces mots un clair de femme....

giulio a dit…

Michel dirait que "C'est une façon comme une autre de dire que vous êtes très exigeante", chère Christiane.

Tenez! Un ami épistolaire qui vous "connaît" par le blog de Jalel m'a écrit: "Je me demande comment fait quelqu'un comme Christiane pour être toujours dans un état de poésie et de rêve permanents".

Il est vrai qu'à l'instar de cette élégance qui a l'air innée dans la poésie de Maryam Haidari, vos mots semblent couler en poésie avec une facilité déconcertante
.

christiane a dit…

cher Giulio, c'est comme entendre un ruisseau et se laisser guider jusqu'à lui par le chant de la langue. Après on plonge la main vers les pierres de lune et il en vient des mots mais ça ne dure qu'un instant, il faut faire très vite....

Pier Paolo a dit…

Magnifique ce poème, très beau, émouvant, tendre et sensuel. En le lisant, je pensais à une autre grande artiste iranienne : Marjane Satrapi.

Pier Paolo a dit…

Ah, j'oubliais, quelle belle femme en plus.

giulio a dit…

Oui, belle comme toutes les poétesses que Jalel nous fait découvrir dans son blog, Pier, des femmes qui ne se voilent pas la face et qui savent rendre la lumière reçue des astres et bien plus encore.

Jalel El Gharbi a dit…

@ Pier Paolo et @ Giulio :
Oui, c'est très beau. Il y a du sublime que j'ai du mal à définir ici.
Disons qu'elle sont belles et qu'elles embellissent en écrivant
Amicalement

gmc a dit…

SUR LE GRANIT

L'enfant qui use
Trouve toujours une larme
Perlière d'océan
Au doux rafraîchissement
Pour peupler son sourire
Des lueurs d'innocence
Propres aux tricheurs
Qui décapitent les épouvantails
Et réinventent l'illumination
Des sapins de Noël

Jalel El Gharbi a dit…

O merci GMC
Amicalement