OEuvre de Bonnard
Arithmétique des couleurs
Et le vieux maître soufi répondit
Prenons la plus parfaite des formes,
L’alpha et l’oméga
Le Alif et le ya
La coupole
Celle dont s’inspirent l’œil et le ciel
La terre et le sein
Ajoutons-y une des couleurs relevées
Par le Grand maître de Murcie
Pour qui toute couleur est un superlatif
Le vert veut dire plus noble
Le noir signifie plus grave
Le blanc est synonyme de meilleur
Le rouge dit plus belle
Et je peins ma coupole en rouge
Non pas celui qui sied aux douaniers et aux gendarmes
Mais celui du Caravage
Celui du quirmiz et des tons qu’il a enfantés
Celui des cerises que chantent les poètes
De la coccinelle dans le silence de son envol
Celui qu’on dit de Florence ou du gingembre
De l’homme épris d’autres lendemains
De l’horizon et des joues de mon amour
Je marie le tout avec mon désir et une coupole
Dont le vert, le noir et le blanc donnent le rouge
Sur cette terre qui est moins bleue qu’il n’y paraît
Arithmétique des couleurs
Et le vieux maître soufi répondit
Prenons la plus parfaite des formes,
L’alpha et l’oméga
Le Alif et le ya
La coupole
Celle dont s’inspirent l’œil et le ciel
La terre et le sein
Ajoutons-y une des couleurs relevées
Par le Grand maître de Murcie
Pour qui toute couleur est un superlatif
Le vert veut dire plus noble
Le noir signifie plus grave
Le blanc est synonyme de meilleur
Le rouge dit plus belle
Et je peins ma coupole en rouge
Non pas celui qui sied aux douaniers et aux gendarmes
Mais celui du Caravage
Celui du quirmiz et des tons qu’il a enfantés
Celui des cerises que chantent les poètes
De la coccinelle dans le silence de son envol
Celui qu’on dit de Florence ou du gingembre
De l’homme épris d’autres lendemains
De l’horizon et des joues de mon amour
Je marie le tout avec mon désir et une coupole
Dont le vert, le noir et le blanc donnent le rouge
Sur cette terre qui est moins bleue qu’il n’y paraît
(Extrait de Prière du vieux maître soufi le lendemain de la fête. Editions du Cygne)
4 commentaires:
Les vers tournent et vacillent tel un derviche tourneur. L’ambiance est, à première vue, ludique et décontractée, car tout y est question de jeu : jeu de lumières, jeu de couleurs, jeu de dualités, jeu de formes… Le présent indicatif et les impératifs présents cadencent le rythme du poème pour le conjuguer dans le mode de l’intemporel. La coupole (ou le cercle « la plus parfaite des formes ») est à la fois inscrite et circonscrite à l’espace du texte qui devient indiscernable et se perd entre l’instant du commencement et l’annonce de la fin, entre l’alpha et l’oméga, ou encore entre Le Alif et le ya. Cette même coupole, en plus de plusieurs formes arrondies, allant des yeux jusqu’aux coccinelles, en passant par les lettres rondes, confèrent au poème une ambiance orientale. Du coup le texte est semblable à un texte religieux ou à une fresque persane dont en émanent des senteurs d’épices et un halo de spiritualité. La spiritualité est accentuée par l’évocation de maintes entités originelles : les lettres alphabétiques synonymes du Verbe, le blanc et le noir, connotatifs de la lumière et de l’obscurité, la terre nourrice et le sein, équivalents de la maternité protectrice. Loin d’être un jeu, ou un simple rituel sacré, l’exercice du vieux maître soufi est ainsi un acte de création, une création aussi pénible et sanglante qu’un accouchement. C’est l’enfantement du rouge, le rouge des cerises des poètes, le rouge des joues de la bien-aimée, le rouge de la liberté.
Je vous remercie de cette lecture si poétique.
Vôtre
J'aime beaucoup !
Que ce poème soit acrédité par un peintre est un honneur
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