lundi 6 août 2012

Ceux qui ne supportent ni Beethoven ni Schiller passent encore à l'action

Un salafiste a agressé hier Cheikh Abdelfatah Mourou à Kairouan.
L'agresseur serait un criminel qui a profité de la grâce accordée par Moncef Marzouki. Avant de lancer à  toute volée un verre à la face du Cheikh, l'agresseur lui a reproché sur un ton qui se veut spirituel d'avoir chanté ". Moi, je suis un musulman qui ne chante pas", en allusion à un passage à la TV du Cheikh où il a chanté sur l'air de la 9eme symphonie de Beethoven le poème de Schiller.
Nous payons aujourd'hui les frais de la démagogie de ce président sans prérogatives et du laxisme du gouvernement. 
Parmi les premiers à se rendre au chevet du Cheikh d'hypocrites prédicateurs de la haine, des ignares qui croient détenir la science infuse.
En cette circonstance aussi pénible qu'inquiétante, je souhaite un prompt rétablissement au Cheikh et exprime toute ma solidarité avec lui. 


6 commentaires:

giulio a dit…

Comment peux-tu encore t'étonner du quasi-quotidien, cher Jalel ?

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www.zlv.lu/spip/spip.php?article7737
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Halagu a dit…

Jalel mon ami,

J'avais besoin de m'évader, soif de partir ''loin de la médiocrité /ou nous sommes ancrés'' et vous m'avez offert le meilleur ''songe ''. Une fenêtre, ouverte sur la mer bleue à peine ridée, accompagne avec grâce ''une pure poésie'' de Giulio. Quoi de plus beau que ce ''Simple appel du large/ ou d'une vie meilleure'' ? c'est, en tout cas, un instant de bonheur et de tendresse offert.
Mais, comme d'habitude, l'horreur reprend ses droits, et votre dernier post et la photo qui l'accompagne étaient là pour nous le rappeler.
La fin du merveilleux poème de Giulio nous interpelle et dit ''Nous n'avons pas le droit/ D'abandonner ceux qui ne volent point... À la tyrannie des juges/ Autoproclamés.'' C'est un appel pressant pour que nous fassions place à la fraternité, à l’humanité, à l'Universel et à la joie. Beethoven a écrit sa Symphonie N° 9 et l'a dédiée à la fraternité, à l’humanité, à l'Universel et à la joie. Le dernier mouvement de la symphonie est inspiré d'une œuvre de Schiller, un autre humaniste, ennemi déclaré des tyrans et combien adulé par les révolutionnaires français. Ces deux chantres de la fraternité, ont-ils pu imaginer que, deux siècles après, leur hymne à la joie mettrait en émoi des illuminés et déclencherait un déferlement de haine et de violence? Ont-ils pu imaginer qu'au même moment, certaines nations, parties à la recherche de traces de vie sur une planète lointaine, arriveraient à donner corps à leur rêve?
Moi, je me remets devant la fenêtre ouverte sur la mer et je continue à penser au rêve des Harragas, à ceux qui espèrent échapper à la misère ou à un destin tragique . Ils font le même trajet emprunté en sens inverse , il y a deux siècles, par des milliers d'Harragas italiens. Ces derniers fuyaient aussi la misère ou un destin tragique et ils ont trouvé refuge sur les terres hospitalières et généreuses de Tunisie. Quoi de plus normal ! Certains ont même cru reconnaître sur les rivages de Tunis, la belle silhouette d'un réfugié déjà célèbre, un certain Giuseppe Garibaldi. Il arrive que certaines vieilles histoires nous envoient une bouffée d'air frais.

Halagu a dit…

Ton bilan, cher Giulio, est tout à fait passionnant. Tout ce qui est relaté dans ces trois textes est connu de tous, mais d'aligner les faits de cette façon, leur donne une intensité dramatique et désespérante.
Je voudrais commenter deux points. Le premier concerne la ''confiscation'' des enfants qui me parait la chose la plus dangereuse, la plus scandaleuse et la plus révoltante du programme des islamistes. Et pourtant, cela n'a pas l'air d'émouvoir beaucoup de monde en Tunisie et à l'étranger. Mais surtout, il ne fait pas réagir comme il se doit, les organisations internationales, en particulier le Comité des droits de l’enfant qui dépend de l'ONU. Comment expliquer cette indifférence criminelle ? Deuxième commentaire, concerne le rôle de l'armée que tu as évoqué en conclusion. Je pense que celle-ci est déjà infiltrée et contrôlée par Ennahdha. Pour preuve, sa participation à l'extradition du ministre libyen sans l'ordre du Président qui est le Commandant des forces armées.
Pour les prochaines élections, j'émets un pronostic. Le parti Ennahdha sortira vainqueur, car il n'y a aucune force politique organisée qui peut le menacer aux urnes. Tu as bien expliqué les raisons.
Enfin, je profite pour préciser mon avis sur la conduite de Mourou. Je ne pouvais pas le faire dans mon précédent commentaire pour ne pas donner l'impression que j'atténuais mon indignation à la suite de cette agression . Je ne retirerai pas un mot de mon texte.
Je me souviens, cependant, de Mourou se justifiant avec obséquiosité devant le prédicateur qatari (celui qui défendait l'excision, j'ai oublié son nom et ce n'est pas un mal !) et on vient de le voir le soir où il a reçu le verre sur la figure et où il disait au salafiste :" ce n'est pas Seddik qui a diffamé Sayda Aïcha (femme du Prophète), c'est Mohamed Talbi"... Je ne commenterais pas cette phrase. Je dirais simplement ceci : le parti Ennahdha a joué le rôle du docteur Frankenstein, créateur d'un monstre qui a échappé à son contrôle. Il fut aidé par Mourou.

Jalel El Gharbi a dit…

Halagu, juste une remarque sur l'armée tunisienne : elle n'est ni infiltrée ni contrôlée par Ennahdha. A mon avis, c'est impossible.
L'armée tunisienne est une institution républicaine. Aucun parti n'a assez de poids pour instrumentaliser l'armée. Lorsque les autres étaient à l'abri le 14 janvier, l'armée était dans les rues et a servi de bouclier à la révolution.

giulio a dit…

J'aimerais tellement croire ce que tu dis de l'armée, cher Jalel, mais je crains que Halagu n'ait raison. Le tout étant de savoir dans quelle mesure l’armée s'est inféodée ou moins à Nahdha.

Comment expliques-tu autrement qu'elle reste aussi indifférente face à l'islamisation du pays, à la généralisation des violences physiques, culturelles, psychologiques et politiques contre la population qu'elle est censée (et qu'elle naguère accepté de) protéger ?

Contre des dangers extérieurs, certes, c’est là, à priori, sa vocation. Mais aujourd'hui en Tunisie, l'ennemi wahhabite et salafiste vient justement en grande partie (voire, historiquement, à 100%) de l'extérieur. Le fait qu’il ait déjà passé le pont-levis et brisé le portail, le fait qu’il soit désormais intra-muros, la dispense-t-elle de défendre la liberté du peuple et d’empêcher qu’il finisse par être réduit en esclavage ?

Personne ne souhaite, certes, qu’elle se substitue au pouvoir civil, comme ce fut parfois le cas en Turquie, en Espagne, en Grèce, au Chili, en Égypte ou ailleurs. Personne ne souhaite une dictature militaire, mais, bien au contraire, que l’armée prenne (tant qu’il encore temps) ses responsabilités de garant des libertés.

Halagu a dit…

''...que l’armée prenne (tant qu’il encore temps) ses responsabilités de garant des libertés.''
Ce fut le cas en Turquie, l'armée a sauvé le pays d'un retour à l'islamisme, en particulier en 1961, 1971, 1980, 1997 et 2007. Aujourd'hui encore, l'armée turque se considère le garant de la liberté et de la praxis kémaliste.
Un des généraux turcs déclarait récemment: «notre armée ne peut pas fonctionner comme celles qui en Europe sont subordonnées au ministre de la Défense. Nous avons la responsabilité de sauver le pays de ''certains'' dangers». Les dangers sont extérieurs et intérieurs. La dictature de la barbe et le tampon sur le front, en fait partie.