mardi 24 mars 2015

Lettre à une étrangère





 OEuvre de Carole Melmoux
 Lettre à une étrangère

Tu peux t’envoler  seule
Et  traverser la mer toute seule
Et toute seule trouver d’autres couleurs
D’autres fruits et sous le sable une rose toute seule
D’autres parchemins,  d’autres livres et sourire toute seule
Mais s’il t’arrive le moindre mal j’ai le cœur qui saigne tout seul
Car alors,  l’étranger  c’est moi.
Jalel El Gharbi

12 commentaires:

giulio a dit…

Un style pictural et une poésie inimitables ! J'ai déjà su que c'était d'elle en voyant le premier tiers supérieur de l'image.

Quant au poème, Jalel, tu ne dis pas s'il de toi... inspiré par Carole... ou par quelque songe vermeerien ?

Jalel El Gharbi a dit…

Le texte est de moi, cher Giulio. Il est inspiré par l'acte sauvage de ces barbares du Bardo

christiane a dit…

Pour moi, Jalel, ce texte a tout du ruban de Moebius. Cette phrase d'Albert Camus (Les Carnets - I- p.60) l'éclaire :
« J’ai besoin parfois d’écrire des choses qui m’échappent en partie, mais qui précisément font la preuve de ce qui en moi est plus fort que moi »
Heureuse de lire Giulio et de revoir une toile de Carole Melmoux.

Jalel El Gharbi a dit…

Oui, Christiane, comme une contorsion pour dire quelque chose de si simple.

christiane a dit…

Non, Jalel, il fallait ce voyage dans les mots pour cueillir la solitude et l'exil dans sa propre terre quand l'autre s'éloigne, meurtri. C'est très beau. et le ruban de Moebius me fascine.

giulio a dit…

« … Mais s’il t’arrive le moindre mal j’ai le cœur qui saigne tout seul / Car alors, l’étranger c’est moi. », dis-tu, cher Jalel. Aussi me semble-t-il discerner, comme en filigrane, entre tes vers, l’ombre d’une crainte que, sous le manteau d’une résistance affichée contre le pire, la gouvernance du pays ne tende peu à peu à se vichyser et ne pousse les patriotes, un instant séduits par la bonne mine d’un compromis historique trompeur, à se sentir de plus en plus étrangers sur leur propre sol et à se poser la question du subir ou résister en clamant…

« La volonté de vivre
Lorsqu'un jour le peuple veut vivre,
Force est pour le Destin, de répondre,
Force est pour les ténèbres de se dissiper,
Force est pour les chaînes de se briser.
Avec fracas, le vent souffle dans les ravins,
au sommet des montagnes et sous les arbres
disant :
"Lorsque je tends vers un but,
je me fais porter par l’espoir
et oublie toute prudence ;
Je n’évite pas les chemins escarpés
et n’appréhende pas la chute
dans un feu brûlant.
Qui n’aime pas gravir la montagne,
vivra éternellement au fond des vallées".


Abou El Kacem Chebbi, dans Les chants de la vie. Traduction de S. Masliah.

giulio a dit…

P.S.: ce n'est pas le poème complet, mais seulement les 1ères strophes. La totalité n'est pas autorisée par la capacité "commentaires". Mais, peut-être, pourrais-tu, Jalel, le mettre en entier dans ton blog, pour que notre chère Christiane et nos autres amis puissent le lire en entier.

Jalel El Gharbi a dit…

@ Christiane, la référence au rubian de Moebius est référence à la subtilité, à la nuance. Juste ceci, dans mon esprit "simplicité" n'est pas du tout négatif.
@ Giulio, oui il faudra que je mette ce poème en ligne.
Pour mes craintes, elles sont réelles. Il n'y aucune possibilité de retour à la dictature en Tunisie. La liberté d'expression est un fait et la démocratie naissante fait des pas de géants. Sauf que ce modèle tunisien indispose, dérange...
Ce que je dis est très simple, je ne peut pas me reconnaître dans une culture qui refuse l'autre...

giulio a dit…

Je ne parlais PAS ENCORE de remise en cause de la démocratie, quoique l'histoire nous apprend que RIEN N'EST JAMAIS ACQUIS. Je faisais allusion à l'ennemi intérieur qui, dissimulé sous le consensus national et en respectant en apparence les règles démocratiques, continue à manoeuvrer pour les miner en attendant 1942. C'est d'ailleurs ce que pense nombre de mes "amis" (et de tes "anciens amis")en Facebook. Pusse-je me tromper !

Jalel El Gharbi a dit…

L'ennemi intérieur est ainsi neutralisé. Honnêtement, je pense que la manière d'agir du Président Sebsi est irréprochable jusqu'à maintenant. Ils n'iront pas loin

isabelle a dit…

J'ai adoré votre poème, cher Jalel, son rythme, sa puissance ! Tout en finesse et simplicité. Merci

Jalel El Gharbi a dit…

Merci de votre passage, chère Isabelle.