samedi 19 mars 2011

L'Infinito (Giacomo Leopardi) voce: Vittorio Gassman


L'INFINI
Toujours j’aimai cette hauteur déserte
Et cette haie qui du plus lointain horizon
Cache au regard une telle étendue.
Mais demeurant et contemplant j’invente
Des espaces interminables au-delà, de surhumains
Silences et une si profonde
Tranquillité que pour un peu se troublerait
Le coeur. Et percevant
Le vent qui passe dans ces feuilles - ce silence
Infini, je le vais comparant
A cette voix, et me souviens de l’éternel,
Des saisons qui sont mortes et de celle
Qui vit encore de sa rumeur. Ainsi
Dans tant d’immensité ma pensée sombre
Et m’abîmer m’est doux en cette mer.
Traduction Jaccottet

L'infinito

Sempre caro mi fu quest'ermo colle
E questa siepe che da tanta parte
De'll ultimo orrizonte il guarde esclude.
Ma sedendo e mirando interminati
Spazi di là da quella, e sovrumani
Silenzi, e profondissima quiete,
Io nel pensier mi fingo, ove per poco
Il cor non si spaura. E come il vento
Odo stormir tra queste piante, io quello
Infinito silenzio a questa voce
Vo comparando; e mi sovvien l'eterno,
E le morte stagioni, e la presente
E viva, e'l suon di lei. Così tra questa
Immensità s'annega il pensier mio:
E'l naufragar m'è dolce in questo mare.

Giacomo Leopardi, L'infinito (1819)
Canti,


Maunuscrit de la première version du poème.

mardi 15 mars 2011

El Hachemi Guerouabi Houz Malta, ou les belles captives

El Hachemi Guerouabi (1938-2006) est un classique de la musique algérienne. Celui qui s’est fait connaître partout au Maghreb grâce à sa chanson « Hier encore j’avais vingt ans » البارح كان في عمري عشرين, est surtout un grand interprète de la chanson arabo-andalouse avec ses deux principaux volets le gharnati et le hawzi, aux accents plus locaux.
Il interprète ici un texte du poète Mohamed Ben Frikhan, texte que l’on trouve dans l’anthologie de la chanson populaire qu’on doit à Cheikh Belkbir. Dans ce poème, il est question des corsaires maghrébins qui écumaient la Méditerranée, et plus précisément du capitaine Najem commandant un imposant trois-mâts rentrant à Alger avec des captives maltaises, aussi belles, dit-il, que des rubis.

dimanche 13 mars 2011

Djalâl ad-Dîn Rûmîجلال الديــن الرومي



Une page du Masnawi, recueil de Rûmï
Où partir ?
Si tu ne veux pas de moi, moi je te veux de toute mon âme
Si tu ne m'ouvres pas ta porte, j'habiterai ton seuil
Car je suis comme le poisson qu'une vague a jeté hors de l'eau
Je n'ai pas d'autre refuge que le flot
Je ne lui demande rien d'autre que lui-même

Où partir... avec ce coeur ?
Quand mon corps, mon coeur et moi-même ne sommes que l'ombre du seigneur.
Avec toi, je suis séparé de moi-même, même effondré, même ivre
C'est par toi que je suis conscient s'il m'arrive de l'être
Car n'es-tu pas celui qui a charmé mon coeur, si tant est qu'il m'en reste un ?
Traduction Jalel El Gharbi
إن كنت لاتريدني ..فأنا أريدك بالروح،
وإن لم تفتح لي الباب، فأنا مقيم على أعتابك.
فأنا كالسمكة إذ يلقيها الموج خارج البحر،
لا ملجأ لي إلا الماء
ولا مطلب لي من إياه إلاه.

...
وإلى أين أمضي .. ولي قلب !؟
وما أنا و جسدي و قلبي إلا مجرد ظل للمليك.
فأنا بك منفصل عن ذاتي ,إن كنت مهدماً ثملا ،
وبك أيضاً يكون وعيي إن كنت واعياً.
ألست فاتن قلبي.. إن كـان قد بقى لي قلــب؟

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mardi 8 mars 2011

Grande est leur manigance

Des femmes
Un verset coranique souvent cité dit, s’agissant des femmes : « grande est leur manigance » . « Manigance », « complot », « ruse ». Pourtant « grande est leur manigance » : les femmes complotent contre nous, elles rusent poétiquement. Elles rusent parce qu’elles sont aussi métaphores, comparaisons.

Elles rusent par leur parenté avec la pomme, la distance, le lever du jour, l’extase, les fraises, la stance, les roses, le thym, le miel, le nid, les fleurs, le sucre, le papillon, les vagues, la violette, le sapin, le lait, les dunes, la strophe, le saphir, la diérèse, la perdrix, la source, le château, la constance, le feu, le savoir, le pétale, le clair, le diamant, la sonate, la coupe, le potager, le jour, la perle, l’air, la pêche, les amphores, la galette, le réséda, la proximité, la feuille, la parole, la forêt, la libellule, la poésie, le lierre, la fourrure, la laine, le rouge, la cabane, l’étoile, le pommier, le riz, l’abricot, le rubis, la découverte, le silence, la brise, le coquillage, l’opale, l’obscur, l’algue, le cristal, la cigogne, l’amandier, la synérèse, la sirène, la cerise, l’ivresse, l’air, l’oasis, le verger, le violon, la chasse, la guitare, la statue grecque, le vertige, le jus d’orange, la jasmin, le lys, la montagne, le bijou, la forêt, l’inconstance, la douceur des fricatives, la friandise, l’émeraude, le soleil, la barque, le galet, la nuit, le sel, la lune, la lettrine, la fontaine, l’abricotier, le vin, la danse, le chant, la musique, la fraise, le bleu, la colline, le pigeon, le romarin, le violet, le pin, le poème, la partition, la neige, l’herbe, le sable, l’arc-en-ciel, la connaissance, la topaze, la pêche, l’escale, la lettre, l’améthyste, l’éclaircie, la beauté. « Grande est leur manigance ».
(Extrait de Prière du vieux maître soufi le lendemain de la fête. Editions du Cygne)