mercredi 24 avril 2013

Pèlerinage de la Ghriba

Du 26 avril au 28, aura lieu à Djerba le pèlerinage de la Ghriba, la plus ancienne synagogue du monde construite au Vème siècle avant J.C. Ce pèlerinage coïncide avec la fête du ל"ג בעומר (Lag Ba'omer). 
Bienvenue à tous ceux qui croient que la Tunisie est encore ce qu'elle a toujours été, ce qu'elle sera toujours : une terre d'accueil. Et bonne fête à nos compatriotes de confession juive.

mardi 23 avril 2013

L'erreur est plus belle


Étonnant ce poème dit le dernier de Robert Desnos. Il aurait été trouvé grâce à Joseph Stuna, un jeune tchèque, étudiant en médecine, qui se trouvait au camp de Theresienstadt. Erreur ! Mais si belle !


Dernière photo de Robert Desnos, 1945.
Ombre parmi les ombres

J'ai rêvé tellement fort de toi,
J'ai tellement marché, tellement parlé,
Tellement aimé ton ombre,
Qu'il ne me reste plus rien de toi,
Il me reste d'être l'ombre parmi les ombres
D'être cent fois plus ombre que l'ombre
D'être l'ombre qui viendra et reviendra
dans ta vie ensoleillée
En vérité, il s'agit d'une traduction d'une traduction approximative en tchèque d'un poème paru dans le recueil Corps et Bien en 1932 :

J'ai tant rêvé de toi
J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant
Et de baiser sur cette bouche la naissance
De la voix qui m'est chère?

J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués
En étreignant ton ombre
A se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas
Au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante
Et me gouverne depuis des jours et des années,
Je deviendrais une ombre sans doute.
O balances sentimentales.

J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps
Sans doute que je m'éveille.
Je dors debout, le corps exposé
A toutes les apparences de la vie
Et de l'amour et toi, la seule
qui compte aujourd'hui pour moi,
Je pourrais moins toucher ton front
Et tes lèvres que les premières lèvres
et le premier front venu.

J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,
Couché avec ton fantôme
Qu'il ne me reste plus peut-être,
Et pourtant, qu'a être fantôme
Parmi les fantômes et plus ombre
Cent fois que l'ombre qui se promène
Et se promènera allègrement
Sur le cadran solaire de ta vie.

mercredi 17 avril 2013

Barend Cornelis Koekkoek au musée de Luxembourg


Barend Cornelis Koekkoek et le paysage luxembourgeois au M.N.H.A. 



Notre ami Giulio-Enrico Pisani publie dans le Zeitung Vum Lëtzebuerger Vollek ce compte-rendu de l'exposition consacrée à Barend Cornelis Koekkoek : 
Pour commémorer le 150e anniversaire de la mort du célèbre paysagiste néerlandais Barend Cornelis Koekkoek (1803–1862), le Musée National d’Histoire et d’Art (1) expose les paysages luxembourgeois grand format qu’il réalisa pour le compte du Roi Guillaume II des Pays-Bas (Grand-duc du Luxembourg 1840–1849). Au coeur de l’exposition se trouvent les trois tableaux encore connus de nos jours du cycle original constitué de neuf pièces. À côté d’autres tableaux du Maître, l’exposition présente de nombreux croquis et dessins réalisés par Koekkoek à l’occasion de son voyage au Luxembourg au cours de l’été 1845. En outre, le visiteur découvrira des aquarelles de William Turner avec des vues de Luxembourg vers 1839, ainsi que des oeuvres représentant des motifs luxembourgeois, entre autres d’Alexandre Joseph Daiwaille, beau-frère de maître Koekkoek, du poète et dessinateur français Victor Hugo, de l’artiste peintre luxembourgeois Jean-Baptiste Fresez et de deux grands innovateurs de la peinture de paysage belge et néerlandaise vers 1850, Théodore Fourmois et Willem Roelofs.
Et autant pour la présentation du M.N.H.A., résumé qui nous en apprend assez pour nous mettre en appétit, mais non, bien sûr, pour répondre aux interrogations des plus curieux d’entre nous. Faut donc s’y rendre. Et là, une présentation détaillée vous attend entre les pages d’un un volumineux catalogue que l’on peut consulter à gauche de l’entrée de l’expo, elle-même s’ouvrant à droite en sortant du lift au 4ème étage du musée. Mais laissez pour l’heure cette riche documentation aux aficionados et étudiants d’histoire de l’art, amis lecteurs, quitte à y revenir après la visite, si l’une ou l’autre question vous taraude. Car l’essentiel n’est-il pas avant tout de pouvoir pleinement profiter de la vue des magnifiques paysages dépeints par Barend Cornelis Koekkoek et par les autres artistes exposés, ainsi que de leurs dessins, esquisses et gravures ?
Notez tout de même qu l’exposition commence par quelques tableaux et sculptures représentant Guillaume II des Pays-bas et autres « souvenirs » Orange-Nassau. On pourra plus ou moins apprécier en fonction de l’importance de ce souverain dans la protection des artistes de son royaume (Luxembourg inclus). Et il est vrai, que le titre complet de l’exposition est « Peint pour le roi / Barend Cornelis Koekkoek & le paysage luxembourgeois ». Mais en fait, la première partie du titre ne se rapporte qu’aux trois paysages peints par Koekkoek pour Guillaume II, ainsi qu’à cinq des oeuvres présentées tout au début de l’expo. Ce ne sont de toute façon guère des chefs-d’œuvre, et leur présence ne se justifie qu’à peine dans le cadre de cette exposition dont surplomber l’essentiel de l’intitulé par un pompeux « Peint pour le roi » me paraît exagéré. Reconnaissons cependant que l’encombrement de ces cinq tableaux ne dérange guère et ne nous retarde nullement dans l’exploration des peintures de Koekkoek et des autres merveilles qui nous attendent deux pas plus loin. Bon, quand je dis merveilles, il faut vraiment que vous me preniez au mot. En effet, plus féeriques que réalistes, nombre de ces paysages du Luxembourg, mais aussi d’ailleurs, répondent davantage à l’idéal d’harmonie et de beauté bucolique que poursuivait le peintre de l’époque, plutôt qu’à une véritable fidélité au sujet.
Exemple : ce splendide « Paysage Luxembourgeois avec vue sur la Moselle » de Koekkoek, à la localisation douteuse, qui est devenu plus tard « Paysage Rhénan l’après-midi ». Ainsi que bien d’autres, ce tableau représente en fait une composition de complaisance réunissant plusieurs éléments de paysage sur une seule et même toile. Autre exemple, également de Koekkoek : une « Vue sur Heidelberg » et la vallée du Neckar, où manque le célèbre Vieux pont caractéristique de ce paysage. Dérangeait-il peut-être l’artiste par sa lourde maçonnerie dans sa représentation de cette poétique Landschaft du Neckar, où à la ville même d’Heidelberg n’échoit d’ailleurs que la portion congrue ? (2) On pourrait aussi penser que Koekkoek ait peint ce paysage, non d’après nature, en 1837, mais d’après un tableau plus ancien, d’avant 1788, date d’inauguration de ce pont. Mais alors, l’artiste n’eût-il pas dû représenter le pont précédent, sur les fondations (datant du Moyen-âge) duquel repose ce fameux Vieux pont ? Mais à quoi bon ergoter ! Reconnaissons en effet que, dans la plupart de ces cas, l’intérêt historique des oeuvres ne saurait être vraiment remis en cause. Certaines inexactitudes permettent en fait d’apporter, grâce à leur étude, un éclairage fascinant au contexte historique et artistique de leur création. Ajoutez à cela le plaisir esthétique qu’elles nous offrent, et nous pouvons tranquillement convenir qu’elles constituent dans leur ensemble non seulement un trésor artistique, mais aussi historico-documentaire et pédagogique intéressant.
Il ne faudrait cependant pas que j’oublie d’attirer votre attention sur cette extraordinaire collection de faïences et porcelaines d’époque (1825-1855), fabriquées à Limoges, Maastricht, mais surtout par Villeroy & Boch à Mettlach et Septfontaines-lez-Luxembourg et gravées, peintes ou imprimées par Zens frères d’Echternach. (3) Contrairement aux autres « nobles souvenirs » susmentionnés, elles sont illustrées de nombreux paysages luxembourgeois – surtout châteaux et ruines – d’après des gravures ou peintures de maîtres renommés. Je pense entre autres aux châteaux de Brandenbourg, Vianden et Burscheid d’après des lithographies de Nicolas Liez, ainsi qu’aux vues de Clervaux, Wiltz, Esch/Sûre, Stolzembourg, Vianden, Falkenstein, Erpeldange, Useldange, Berg, Larochette, Meysembourg, Hollenfels, Schoenfels, Ansembourg, Beaufort, Septfontaines, Dommeldange, Walferdange, Luxemburg, Hesperange, Ko­ckelscheuer, Burglinster ou Schengen. Je puis donc conclure sans aucune exagération que, outre le plaisir de la vue que l’on ressent devant cette splendide exposition de tableaux et d’artefacts, c’est toute une partie de la mémoire du Grand-duché qui nous revient, au sens propre comme au figuré, grâce à cette exposition que tout un chacun devrait avoir à coeur de visiter.
Giulio-Enrico Pisani
***
1) Musée national d’histoire et d’art, Marché-aux-Poissons, Luxembourg ville.Visites mardi à dimanche 10–18 h, mais jeudi 10–20 h (17-20 h gratuit), jusqu’au 9 juin. Pendant le week-end de la Pentecôte, les samedi 18 et dimanche 19 mai 2013 week-end portes ouvertes. Autres détails sur www.mnha.public.lu.
2) Réflexions majoritairement confirmées dans le catalogue susmentionné, dû aux contributions d’Asker Pelgrom, de Jeroen van Zanten, Ellinoor Bergvelt, Lut Pil, Malgorzata Nowara, Pit Péporté, Guy May et Jean-Claude Muller.
3) Nom complet : Manufacture royale grand-ducale de peinture céramique d’Echternach Zens frères.

mardi 16 avril 2013

Nouvelle publication posthume de Maurice Carême


 Un nouveau recueil de poèmes de Maurice Carême vient de paraître. Il s’intitule L’évangile selon saint Carême. Il s’agit du neuvième recueil posthume de l’écrivain.
 Derrière un titre provocant et ironique, se révèle le cheminement spirituel qui anime l’œuvre de Maurice Carême. Il y parcourt les figures de l’Histoire sainte apprise dans son enfance. Il jette sur elles un regard tantôt narquois, tantôt grave et pose, sous un voile d’humour, les questions auxquelles les hommes sont confrontés face au mystère de la vie et de la mort.





Maurice Carême,
L’évangile selon saint Carême
Lausanne, L’Âge d’Homme, 2013
ISBN 978-2-851-4311-7
16 €
 Peut être commandée auprès de la Fondation Maurice Carême ( Bruxelles)

dimanche 14 avril 2013

Le vénérable Dion

Une épitaphe de la fin du Vème  siècle conservée au musée de Enfidha perpétue le souvenir de Dion. Il est mort à 80 ans, après avoir planté 4000 arbres, vraisemblablement des oliviers.

jeudi 11 avril 2013

En lisant Victor Serge


Ce témoignage poignant inscrit Victor Serge ( né en exil en 1890 et mort en exil en1947) dans la lignée du Dostoïevski des Souvenirs de la maison des morts, du Tchékhov de l'Ile de Sakhaline et le place bien avant le Soljenitsyne d'Une journée d'Ivan Denissovitch et le Chalamov des Récits de la Kolyma
On lit ici une page irrésistible sur Saadi, écrivain public et poète rappelant le Saadi de Chiraz : "Car toute science n'est que poème, tout poème exprime un charme et les charmes guérissent, et les poètes devinent ; or Saadi connaissait en plusieurs langues, le turc, l'arabe, l'iranien, des vers pour toutes les circonstances de l'autre Saadi, ceux de Firdousi, les siens propres et ceux du Poète Sans Nom qui parcourt les pistes de l'Iran depuis le règne de l'Iskander, il y a mille ans."

samedi 6 avril 2013

Grand événement culturel en Tunisie




Il y a 13 ans jour pour jour l'artisan de la Tunisie moderne nous quittait. A cette occasion, s'ouvre  aujourd'hui le musée Habib Bourguiba dans l'enceinte du palais de Skanès, oeuvre du grand architecte tunisien Olivier Clément Cacoub.

vendredi 5 avril 2013

Poème d'Evelyne Boix-Moles



   « […] gracias por el ejemplo »
Luís Cernuda
Toi, jeune homme,
ton élan, ta fougue,
ton geste juste.

Et depuis des lustres déjà,
la terre a bu ton visage,
mangé ton corps. 

Ô cœur qui bas encore par mes veines…

Mais que nous importait,
n’est-ce pas, cette mort-là.
Que nous importait...

Tu ne sauras pas 
les pleurs, nuits éventrées 
par les nouvelles guerres. 

Tu n’entendras pas 
le quotidien, combat
impossible à mener.

Tu ne pleureras pas 
de ne pas savoir, contre 
les fantômes, te battre.

Tu ne pleureras pas.

Et ce soir, 
je dis ce peu de mots ;
ce soir, la terre, 

indifférente,

je la dis 
bonne ;
je dis 

que la roche  
– les glaces un instant y enchâssent 
les étoiles –  est un tombeau 

digne de toi, 

cher entre les chers, 
source entre les sources, 
qui luttas pour que s’accordent

naissance, beauté.
 

** 2005

jeudi 4 avril 2013

Aujourd'hui, l'oxymore

Aujourd'hui, je me suis entendu dire à la fin de mon cours:
"En un mot, il y a quelques années, j'aurais dit l'oxymore permet de créer une tierce réalité. Aujourd'hui, je dirais qu'il nous permet d'accéder à une autre réalité. Je ne puis le dire plus clairement."
A l'éclat des yeux de mes étudiant(e)s, j'ai compris qu'ils avaient compris.
Image: wikilittérature

mardi 2 avril 2013

Texte de Mohammed Choukri (inédit en français)


Voici une traduction de l'avant-propos écrit par Mohammed Choukri à son autobiographie Le Pain nu. Le texte ci-dessous est inédit en français. Il a été traduit en classe avec les étudiants préparant l'agrégation.


Avant-propos
Bonjour, vous qui êtes de la nuit.
Bonjour, vous qui êtes du jour.
Bonjour Tanger, toi qui es enraciné dans une temporalité évanescente.
 Me revoici à errer, tel un somnambule, à travers les ruelles et les souvenirs ; à travers les plans que j’avais faits pour ma vie passée, présente…Des mots, des fantasmes, des cicatrices qu’aucune parole ne peut refermer.
Où situer ma vie dans ce tissu de mots ?
Mais les effluves des soirées et des nuits regorgeant d’appréhensions et de propensions pour l’aventure s’insinuent en moi afin de transformer les cendres de la braise en gazes séduisantes…
Il y a deux ans qu’il est mort Abdoun Forso, le véritable héros qui a éveillé mon imagination et m’a aidé à supporter l’injustice, la frustration et la violence du corps-à-corps… Il est mort avant que je ne publie La Tente, inspiré de sa présence, de sa ferveur et de sa passion pour la vie.
J’attends l’affranchissement de la littérature qui ne rumine, ni ne feint. J’ai écrit ces pages de mon autobiographie, il y a dix ans et publié leur traduction en anglais, en français et en espagnol avant qu’elles ne parviennent au lecteur dans leur version originelle.
La vie m’a bien appris à patienter, à prendre la mesure du temps sans pour autant renoncer à la profondeur de ce que j’avais engrangé.
Avant de mourir, dis ce que tu as à dire, cela finira inévitablement par se frayer son chemin. Peu importe ce qu’il en adviendra. Ce qui prime, c’est que cela déclenche une flamme, une peine, qui désir qui sommeillent [en nous] et que cela embrase des endroits déserts, enterrés.
Ô vous qui êtes de la nuit ou du jour, pessimistes ou optimistes, vous les rebelles, les adolescents, les « sages »… n’oubliez pas que le jeu du temps est plus fort que nous. C’est un jeu fatal auquel on ne peut faire face qu’à la condition de vivre la mort qui nous sera infligée, de faire le funambule par amour pour la vie.
Je soutiens ceci : il « fai[t] sortir le vivant du mort », il fait sortir le vivant de la puanteur, du putride et du sang de ceux-là qui se nourrissent de pain nu. 

lundi 1 avril 2013

En lisant Guéhenno

Sait-on jamais d'où souffle sur vous le désir, et ce qui fait de vous cet animal avide prêt pour la damnation ?