Nahdha ne peut pas continuer indéfiniment à encourager l'islamisation du pays à la wahabite et afficher le visage tolérant qu'elle emprunte à Cheikh Mourou. Elle ne peut pas mettre tout à la fois les hardes afghanes et exhiber la jebba bien tunisienne du Cheikh Mourou. En un mot, elle ne peut pas concilier islam wahabite et islam tunisien.
Le Cheikh Mourou vient de payer les frais de ces réalités irréconciliables, en se faisant agresser pour la deuxième fois. A Jemmal, il s'est fait violemment expulser de la mosquée, où il voulait prier, par un groupe d'illuminés harangués la veille par un imam intolérant, pour apostasie ! Traiter Cheikh Mourou d'apostat, c'est renier l'islam zeitounien, celui dans lequel nous avons été élevés. Un islam qui laisse une marge au péché, à l'erreur, à l'égarement, au doute, à la quête. Celui qui croit en la miséricorde de Dieu, en sa clémence. Celui qui ne refuse pas la vie, ni ne récuse les joies et les plaisirs de l'existence, ni le bonheur de la fête. L'islam zeitounien, le nôtre est avant tout culte de la connaissance, amour de la découverte, amour de l'amour.
Nos frères du Golfe déversent tant d'argent afin que nous partagions l'hérésie wahabite qui leur tient lieu de foi et qui fait que leur pays est inhabitable. Ils s'en consolent en se rendant souvent en Suisse, en Espagne et en Angleterre, au pays de leurs alliés, qu'ils tiennent pourtant pour des mécréants. Ils recrutent nos jeunes dans les milieux les plus déshérités et les envoient au casse-pipe en Syrie et au Malie alors que leurs enfants sont à Harvard ou Boston. Leur désir le plus ardent est de faire de nous des populations aussi misérables que les populations afghanes ou somaliennes. Parce que, bien entendu, il n'est pas question qu'ils partagent avec nous leur pétrole, mais uniquement leurs idées, celles qui leur ont été dictées et que Med Abdelwahab a transcrites. Pourtant, dès 1810, les ulémas de la Zeitouna ont décliné l'invitation au wahabisme dans la lettre magistrale de Abu Al Qacem Mahjoub et dans l'ouvrage cinglant de Cheikh Temimi (ouvrage qui n'a jamais été réédité, pour ménager la sensibilité de nos frères du Golfe). Juste une dernière chose, nos amis américains, car ce sont bien les nôtres, avant même que les monarchies du Golfe ne viennent au monde, laissent faire, mettant en péril l'aspiration d'un peuple à la liberté, au progrès.
3 commentaires:
Nos amis américains laissent faire, dites-vous. Assurément. Et je me demande bien jusqu'à quel point tout cela ne les arrange pas. Plus les pays musulmans seront aux prises avec des mouvements sectaires rétrogrades, plus il y aura des conflits internes entre confessions différentes, moins ces pays seront dangereux politiquement et économiquement.
Exact, Feuilly. Divide et impera ! Quoi de plus logique de la part de l'"empire" ?
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