jeudi 3 juillet 2014

Fragments d'un poème illustré pour Lomé



Ceci est le soleil serein de  Lomé  qui  se lève à l’est du lac et fait le tour jusqu’aux  limites du Ghana pour se cacher loin, très loin derrière le Golfe de Guinée dans le silence velouté d'un premier oubli.  
Pourtant  ce calme n’est pas lacustre.  Il vient du fond des âges transporté par les Peuls chargés de sel,  de racines lointaines, transporté par les blessures que nul ne peut effacer.
Au Togo,  on ne gomme  pas les jours passés.  
L’océan a englouti  la route qui allait au pays de Béhanzin. Mais elle a revu le jour et la nuit . Maintenant  elle marche au coude à coude avec l’Atlantique jusqu’à Cotonou et encore plus loin. 


 Je pourrais égrener des élégies entières mais je préfère le silence et le miel. Ainsi donc on peut être heureux sans étreinte, sans toucher au galbe, sans ces mots empruntés aux flammes,  sans l’ivresse des frissons. 
Qu’ai-je encore bu ?
Dans tout Lomé, il n’y a qu’un vieux baobab tordu et solitaire. (En arabe, babobab se dit tabaldi)
L’horizon qu’il embrasse  aux tropiques est  comme un flamboyant en fleurs.
 
Puis, étourdi par le bleu de la danseuse, le vieil arbre se tut et reprit un autre verre.  
Je suis loin, très loin comme lui tordu et solitaire. Mais je vibre encore, je frémis à chaque pas de danse trempé dans le désir. 

Je n’aurais opposé aucune résistance à naître ici.  
Pour ne pas voir la nuit qui descend, nous avons cherché les noms des golfes et des rivières. 
Suis-je ennuyeux ? 
Non. 
Regarde dans  chaque goutte de pluie, tu verras des monts entiers et des forêts de nuages. 
La voix s’est élevée limpide.
D’où vient cette mélancolie ?  Et  Bella Bellow continue de chanter. Sait-elle quel incendie a pris dans le corps  du vieux baobab ? 

Goute à ces fruits et pleure si le cœur t’en dit.
Un matin, au Saint-Thomas, où l'on n'est jamais étranger, alors que la rumeur de la ville allant gagner sa vie atteignait toutes les  cimes, je me suis dit : j’attends une phrase en langue mina. Si elle vient, je reste. Il faudra alors une éternité  pour que tombe le soir..


Un oiseau prit toutes ses couleurs et s’envola sans se retourner. 
Si elle vient, je reste. Et je passerai le reste du temps à oublier...

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